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  • Les Rendez-vous de Philopop - Le Temps
    Jun 16 2024

    Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 16 juin 2024


    Le Temps


    Que le temps passe, c'est là un fait aussi évident que mystérieux qui est l'objet de la réflexion du philosophe H. Bergson (1859- 1941) tout au long de son oeuvre. En quoi consiste ce passage? Pour le comprendre, nous lirons surtout le 2ème chapitre de son 1er grand ouvrage, Les données immédiates de la conscience (1889).


    Mais pour être en mesure de le saisir, il faut d'abord se libérer de la représentation spatialisante que nous en procure notre intelligence, et comprendre pourquoi elle a besoin de nier sa réalité pour connaitre et expliquer les choses.


    1- La critique de la spatialisation du temps


    a- La transformation du temps réel (la durée) en espace


    b- L'intelligence a besoin d'immobilité


    2- Comment accéder au temps réel (la durée)?


    a- Il y a deux conceptions possibles de la durée: l'une "pure de tout mélange", l'autre "où intervient subrepticement l'idée d'espace"


    b- L'exemple des sons successifs d'une cloche: "ou bien je me propose explicitement de les compter" (compter, c'est dissocier et spatialiser), ou bien, "je me borne à recueillir l'impression pour ainsi dire qualitative que leur nombre fait sur moi"


    3- Les caractères de la durée pure


    a- Elle est "la forme que prend la succession de nos états de conscience quand notre moi se laisse vivre et s'abstient d'établir une séparation entre l'état présent et les états antérieurs"


    b- L'activité de la mémoire constitue la durée en fondant les états de conscience les uns dans les autres et en les organisant en un tout indivisible (voir l'exemple d'une mélodie)


    c- La durée est une activité de synthèse par laquelle le passé est perpétuellement conservé et intégré dans le présent. Il n'y a pas de temps universel qui soit le même tous et qui constitue le cadre des expériences, si ce n'est par convention, pour les commodités de la vie sociale, mais il y a une pluralité de durées individuelles dont le rythme peut varier.


    4- Qu'en est-il de notre identité personnelle (de notre "moi")?


    a- La durée constitue notre moi; “le temps est l'étoffe de notre être” (Evolution créatrice, chapitre 1)


    - Si notre passé se conserve tout entier en nous, la mémoire ne peut pas être une faculté qui conserve et classe des souvenirs


    - C'est la continuité de la durée qui permet de comprendre que nous soyons libres et puissions faire surgir de la nouveauté imprévisible (l'idée d'une "création de soi")


    5- Le temps n'existe-t-il que pour les êtres conscients?


    - De l'expérience de la durée intérieure à l'affirmation de "l'élan vital" (Evolution créatrice, 1907)


    - L'"intuition de la durée"



    Bibliographie:


    - Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), chapitre 2.


    - Evolution créatrice (1907), chapitre 1


    - La Pensée et le Mouvant (1934)

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    45 m
  • Les Rendez-vous de Philopop - Qu'est ce que le pessimisme?
    Apr 21 2024

    Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 21 avril 2024


    Qu'est-ce que le pessimisme ?


    Une lecture du Monde comme Volonté et comme Représentation de Schopenhauer (1819)


    Le pessimisme est ordinairement considéré comme la disposition d'esprit d'un homme qui voit tout en noir. S'agit-il seulement d'une vision de l'existence purement subjective qui est affaire d'humeur ou de tempérament ? Ou peut-on en donner des raisons objectives, comme le prétend Schopenhauer ? Cette émission vise à présenter sa démarche et à expliquer en quoi sa philosophie est un pessimisme.


    1- Le pessimisme réfute toute vision théologique du monde qui conduit à réduire le mal à une apparence ou à un moyen de promouvoir le bien


    a- C'est la rencontre du mal qui suscite l'interrogation philosophique, mais souvent les philosophes ont préféré relativiser son existence, en visant sa justification (optimisme métaphysique de Leibniz; philosophie de l'histoire de Hegel)


    b- La réfutation de l'optimisme de Leibniz (le monde "est le meilleur des mondes possibles"), doctrine illusoire reposant sur un théisme (affirmation d'un Dieu bon auteur du monde) et faisant un usage illégitime du principe de causalité (Dieu est considéré comme la cause première)


    c- L'argumentation du pessimisme opposée à l'optimisme: en quel sens Schopenhauer établit que le monde "est le pire des mondes possibles"


    2- L'élucidation de l'origine du mal (de la souffrance): le "Vouloir" comme puissance universelle et aveugle constitutive de toute chose, la souffrance étant ainsi " le fond de toute vie"


    a- Le désir humain, manifestation de sa force aveugle qui s'éprouve comme "une soif inextinguible" qu'aucun objet désiré ne saurait combler


    b- Si désirer, c'est souffrir d'un manque, le plaisir n'en est que la délivrance passagère. Le bonheur "n'est rien que de négatif"


    c- L'ennui (nous n'avons rien à désirer) est une souffrance plus insupportable que celle que nous éprouvons quand des obstacles nous empêchent de satisfaire un désir. Il révèle le non-sens de l'existence humaine (un parallèle avec Pascal).


    3- Se délivrer du Vouloir-vivre qui est la source du malheur de la vie


    a- La recherche du bonheur conduit au malheur tant qu'il est une course sans fin d’objets en objets.


    b- Quel intérêt pratique peut avoir une philosophie pessimiste: la prise de conscience de la source du malheur de la vie


    c- La "négation du Vouloir-vivre" comme affranchissement du Vouloir-vivre et de la tyrannie des désirs


    Conclusion: Le pessimisme comme remède contre l'illusion optimiste qui expose au désespoir



    Bibliographie:


    1- Le Monde comme Volonté et comme Représentation, d'Arthur Schopenhauer (1819)


    - 4ème partie: "La Volonté s'affirme, puis se nie", et Suppléments 17 ("Sur le besoin métaphysique de l'humanité") et 56 ("De la vanité et des souffrances de la vie")


    2- Pensée 126 de Pascal (édition Le Guern en Folio)


    3- Essais de théodicée de Leibniz, en G/F


    3- Candide, conte philosophique de Voltaire, particulièrement les chapitres 5 et 19

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    58 m
  • Les Rendez-vous de Philopop - Colonialisme et Terrorisme : une confrontation entre Sartre et Camus
    Feb 25 2024

    Les situations historiques ne sont jamais identiques. Mais dans la mesure où l’enchaînement monstrueux des massacres qui ont lieu depuis cinq mois en Israël et à Gaza, nous y incite, il peut être utile de réfléchir à ce qu’ont écrit Sartre et Camus sur le colonialisme et le terrorisme et sur les raisons de leurs divergences à propos du drame algérien, à la fin des années 50.


    1. Le désaccord entre Sartre et Camus sur l’avenir de l’Algérie

    a. Le rejet de la colonisation française. Quelques dates à rappeler : les massacres de Sétif en mai 1945, le déclenchement de l’insurrection armée par le FLN en novembre 1954, la proclamation de l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet 1962.


    b. Pour Sartre, il n’y a pas d’autre solution que l’indépendance. Il accorde son soutien public aux militants du réseau Jeanson qui collectent et transportent des fonds et des faux papiers pour aider les nationalistes algériens.


    c. Camus veut croire encore à une réforme profonde du système colonial qui permette le maintien de l’Algérie française.





    2. Une divergence d’analyse concernant le système colonial

    a. Camus dénonce ses injustices dans ses articles sur la « Misère de la Kabylie » parus dans le journal Alger républicain en 1939, et en appelle à une réforme sociale et économique pour réaliser une « Algérie pacifique et juste ».

    b. Dans l’article qu’il publie en mars 1956 dans les Temps modernes, Sartre montre que « le colonialisme est un système », qui, en raison même de sa nature systémique, ne peut pas être réformé. De l’analyse de sa « nécessité interne » il passe ensuite à l’examen des conséquences de son développement. « L’Etat français livre la terre arabe aux colons pour leur créer un pouvoir d’achat qui permette aux industriels métropolitains de leur vendre leurs produits ; les colons vendent aux marchés de la métropole les fruits de cette terre volée »





    3. Une divergence d’analyse et de jugement sur la nature et le rôle de la violence

    a. Sartre : la violence émancipatrice du colonisé




    • Le système colonial a besoin d’engendrer de la haine pour se maintenir : haine raciste des colons pour les colonisés (qu’ils ont besoin de déshumaniser et d’invisibiliser) et haine des colonisés pour les colons




    • La violence coloniale conduit à la révolte des colonisés. La violence revient ainsi en boomerang contre le colonisateur, le jour où la furie des colonisés ne peut plus être retenue et éclate (c’est le « temps des massacres », voir la préface de Sartre aux Damnés de la terre de Frantz Fanon, 1961)




    • La violence insurrectionnelle des colonisés est le seul moyen pour eux de sortir « des ténèbres coloniales » et de s’émanciper




    b. Camus : le refus de la « casuistique du sang » (Chroniques algériennes)




    • Que la violence soit parfois nécessaire, n’implique pas qu’on puisse en justifier le principe au nom d’une justice absolue, et en faire un usage indiscriminé pour frapper des civils innocents.




    • Les analyses de Camus dans son Essai de 1951, L’Homme révolté : le « crime logique », le « principe de révolte » contre « l’esprit de révolution »




    • On ne peut condamner la torture pratiquée par l’armée française et sa répression féroce menée contre les populations civiles sans condamner en même temps les attentats terroristes du FLN. Pour Camus, c’est l’engrenage des violences qu’il faut combattre, car il ne peut mener qu’à la destruction.




    Conclusion :


    Réfléchir sur ces deux références en cherchant à comprendre la critique que chacune d’elles peut adresser à l’autre. Mesurer combien leur usage médiatique se révèle souvent abusif (j’en donne un exemple pour Camus)


    Bibliographie :


    Situations, V chez Gallimard, recueil d’articles de Sartre dans lequel on peut trouver notamment « Le colonialisme est un système » et sa préface aux Damnés de la terre de Frantz Fanon


    L’homme révolté de Camus, collection Folio


    Chroniques algériennes de Camus, collection Folio

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    47 m
  • Les Rendez-vous de Philopop : L’antisémitisme, le sionisme, la Palestine, l’Etat d’Israël, La réflexion de Hannah Arendt
    Dec 17 2023
    Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 17 décembre 2023 L’antisémitisme, le sionisme, la Palestine, l’Etat d’Israël, La réflexion de Hannah Arendt Face à l’horreur des massacres qui ravagent le Moyen Orient, il paraît utile de lire ou de relire l’œuvre de Hannah Arendt (1906- 1975). En tant que juive allemande, elle dut fuir l’Europe en 1941 et se réfugier aux Etats Unis, où elle prit la nationalité américaine en 1951. L’émission se propose d’examiner les raisons pour lesquelles H. Arendt fut sioniste et celles pour lesquelles elle cessa de l’être L’antisémitisme moderne et les impasses d’une émancipation purement individuelle (Sur l’antisémitisme) Pour comprendre pourquoi les Juifs se sont trouvés « au centre de la tourmente », il faut saisir la spécificité de l’antisémitisme moderne qui ne peut pas être confondu avec la haine des Juifs d’origine religieuse, et replacer son développement dans le cadre de l’Etat-nation en Europe aux XIX et XX èmes siècles. L’antisémitisme politique. Le sort des Juifs étant lié à l’existence de l’Etat-nation, son déclin les expose à l’antisémitisme qui les associe imaginairement à des liens financiers avec un Etat corrompu. L’antisémitisme social. Loin de se traduire dans les mœurs, l’égalité des conditions (qui résulte de l’émancipation juridique des Juifs) engendre un antisémitisme social. Plus les Juifs s’assimilent, plus leur différence fait problème, à mesure que leur identité juive devient moins visible. D’une identité religieuse, on passe à une identité raciale (un « type juif ») fantasmée par les antisémites. Le Juif est alors soumis à une injonction contradictoire : ne pas ressembler à un Juif tout en étant juif. Quels que soient ses efforts pour s’assimiler, le Juif est ramené à sa condition de « paria » et se trouve la proie de l’antisémitisme (« Que Dreyfus est coupable, je le conclus de sa race », écrivait l’écrivain antisémite Maurice Barrès) Du « paria » au réfugié apatride. La justification d’un Etat pour le peuple juif (L’impérialisme) Déchus de leur nationalité et de leur citoyenneté par l’Allemagne nazie (fin des années 30), les Juifs sont réduits à la condition de réfugiés apatrides : « Il semble qu’un homme qui n’est qu’un homme a précisément perdu les qualités qui permettent de le traiter comme leur semblable ». Le premier des droits d’un être humain doit être celui « d’avoir des droits » : cela ne signifie pas seulement des droits civils aux individus, mais cela implique aussi le droit pour un peuple à la liberté politique et à se constituer en nation dotée d’un Etat pour protéger ses droits (L’Etat d’Israël assure « l’établissement de droits humains ») Quelle doit être la structure du nouvel Etat en Palestine dont les Juifs ont besoin ? La rupture de H. Arendt avec le sionisme En quel sens il faut entendre, selon H. Arendt, l’idée d’un peuple juif Les critiques de H. Arendt à l’égard du mouvement sioniste auquel elle reproche de ne pas prendre en compte l’existence des Arabes Palestiniens et de vouloir imposer par la force la création d’un Etat national juif La fondation d’Etats-nations en Palestine risque de conduire au même échec auquel ont été conduits les Etats-nations d’Europe centrale après le démembrement de l’empire austro-hongrois en 1919. Elle risque de mener à une guerre sans fin (des minorités opprimées, et l’expulsion de populations : 750 000 Arabes palestiniens sont ainsi transformés en réfugiés, privés « du droit d’avoir des droits », comme l’étaient en Europe des centaines de milliers de Juifs à la fin des années 30). Contre la solution d’Etats-nations, H. Arendt préconise celle d’un Etat bi-national assurant des droits égaux aux Juifs et aux Arabes et organisé sur la base de conseils où ils régleraient ensemble les problèmes qu’ils ont en commun. Bibliographie : - Sur l’antisémitisme, 1er tome des Origines du totalitarisme (1951), de Hannah Arendt, collection Essais/Points, et L’Impérialisme, chapitre V : « Le déclin de l’Etat-nation et la fin des droits de l’homme « , 2ème tome des Origines du totalitarisme, même collection -Dans Ecrits Juifs (chez Fayard), deux articles : «Réexamen du sionisme » (1944) et « Pour sauver le foyer national juif » (1948)En complément de cette émission, on peut écouter aussi sur Ouest track : L'affaire Dreyfus comme symptôme de l'antisémitisme; - L'affaire du paquebot le Saint Louis en 1939 : réflexion sur les droits de l'Homme et la question des migrants et des réfugiés; - L'antisémitisme (lecture des Réflexions sur la question juive de JP Sartre). Voir la liste des podcasts des Rendez vous de PHILOPOP. 
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    48 m
  • Les Rendez-vous de Philopop - Les philosophes des Lumières face à la traite négrière et à l'esclavage colonial
    Oct 29 2023
    1- Pourquoi les Lumières sont-elles mises en question ?a- La reconnaissance assez récente des injustices du passé colonial: la Loi du 21 mai 2001, dite "Taubira", et, depuis le 10 mai 2006, célébration d'une "journée de commémoration nationale des mémoires de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions" (1794 et 1848)b- Quelle position et quel rôle ont eu les philosophes des Lumières (on limitera le propos aux philosophes français parmi lesquels Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Diderot...)? Ont-ils fermement combattu la traite et l'esclavage ou en ont-ils seulement condamné le principe au nom de l'universalité des droits, tout en en justifiant la pratique pour des motifs politiques et économiques ?c- Montesquieu (Livre XV de l' Esprit des Lois, 1748) est considéré comme le premier philosophe à avoir posé les principes théoriques de la dénonciation de l'esclavage. Son statut fondateur est-il mérité, et au-delà de son cas, peut-on continuer à affirmer la vertu émancipatrice des Lumières ?2- Le cas Montesquieu comme illustration des « ambiguïtés » des philosophes des Lumières (critique de Louis Sala Molins, dans Le Code Noir ou le calvaire de Canaan)a- Il serait silencieux sur la pratique de l'esclavage afro-antillais et sur l'existence du Code Noir (texte promulgué en 1685 qui réglemente en 60 articles l'usage et la vie des esclaves dans les colonies françaises)b- Il serait indifférent au sort des esclaves noirs, comme en témoignerait le ton léger de l'ironie et de la plaisanterie sur un sujet aussi grave, dans le célèbre chapitre 5 du Livre XV, De l'esclavage des nègres. Critique adressée par Bernardin de St Pierre dans le post-scriptum de la 12ème lettre du Voyage à l'Ile de France (1773).c- Sa condamnation de l'esclavage serait très ambigüe puisqu'elle admettrait son existence dans les pays chauds (conformément à la théorie du climat exposée au Livre XIV)d- Cette condamnation se trouverait contredite par la 2ème partie du Livre XV où Montesquieu ne se préoccupe plus que d'indiquer comment prévenir les "abus" et les "dangers" de l'esclavage. Montesquieu est-il vraiment anti-esclavagiste ? Son souci n'est-il pas plutôt de réfléchir aux moyens de perpétuer l'esclavage colonial en évitant des révoltes ?3- Réponses aux critiques. Lire le Livre XV en confrontant son propos aux préjugés dominants du XVIIIème sièclea- Montesquieu produit une définition générale de l'esclavage (chapitre 1) qui comprend aussi bien l'esclavage antique que l'esclavage moderne, le servage que l'esclavage "pris à la rigueur tel qu'il était chez les Romains et qu'il est établi dans nos colonies" (note du chapitre 2). L'absence de référence explicite au Code Noir n'est-elle pas une affaire de prudence ?b- Lecture du chapitre 5 "De l'esclavage des nègres": l'ironie comme arme suprême des Lumières contre l'injustice et l'absurde, et comme réaction réfléchie de Montesquieu aux opinions dominantes du moment (à propos de la nécessité économique de la traite et de l'esclavage, à propos de la question de l'origine de la couleur des Noirs...)c- Expliquer la présence de l’esclavage dans un certain nombre de contextes (politiques et géographiques) n'est pas le justifier. S'il favorise la servitude, un climat chaud n'est jamais une fatalité. L'argument de la chaleur du climat est fallacieusement invoqué par des élites économiques pour justifier l'institution de l'esclavage dans les colonies et son maintien (chapitres 7 à 9).d- L'esclavage étant institué dans les faits, le problème est d'éviter ses abus et ses dangers (chapitre 11). Montesquieu préconise ainsi son encadrement juridique. Il n'est pas abolitionniste, il plaide pour des mesures progressives d'affranchissements (ce sera le programme de la Société des amis des Noirs, fondée en 1788)4- Le mouvement des Lumières comme prise de conscience progressive du caractère insoutenable de l'esclavage coloniala- Les Lumières ne sont pas un état doté d'emblée de principes déjà constitués.(les droits de l'Homme) Elles ne se caractérisent pas non plus par une doctrine homogèneb- L'un des premiers plaidoyers en faveur de l'abolition est rédigé par le chevalier de Jaucourt, un encyclopédiste ami de Diderot: il s'inspire explicitement de l'argumentation de Montesquieu dans deux articles importants ("Esclavage" et "Traite des Nègres". L'Encyclopédie ne parle pas pour autant d'une seule voix, c'est un lieu de débat : on y trouve aussi des articles favorables à l'esclavage.c- Les contradictions des Lumières: entre un progrès économique fondé sur la recherche du "luxe" (au nom duquel la traite et l'esclavage paraissent indispensables) et un idéal humanitaire qui au contraire les condamne.Bibliographie :Esprit des Lois, Livre XV, de Montesquieu (1748)Le Code Noir ou le calvaire de Canaan, Louis Sala Molins, 1987Esclavages, Les ports normands dans la traite atlantique, ...
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    55 m
  • Les Rendez-vous de Philopop : Présentation de la saison 2023-2024
    Sep 17 2023

    Présentation des activités de PHILOPOP (association populaire de philosophie du Havre) et du programme de la saison 2023-2024

    1- PHILOPOP, une association ouverte à tous



    • Quelques précisions d'ordre pratique :


    voir sur le site de PHILOPOP ( https://sites.google.com/site/philopoplh/ ) le barème des cotisations, le calendrier adopté, le rythme des séances (en moyenne 2 fois par mois un mardi ou un jeudi de septembre à juin hors vacances scolaire), le lieu et l'horaire  (au Lycée Claude Monet du Havre, salle audio, de 20H30 à 22H30)



    • Les questions philosophiques: des questions que tout homme peut être amené à se poser au cours de son existence (exemple de la vérité)



    • L'ambition de PHILOPOP : permettre à tous ceux qui le souhaitent d'accéder à un questionnement philosophique en offrant les conditions d'un travail suivi



    2- Les séances au lycée Claude Monet: la formule d'un cours progressif (suivi d'une discussion)



    • Il ne consiste pas dans un exposé de connaissances et ne présente pas la pensée des philosophes comme une opinion savante

    • Il montre comment l'examen d'une notion (la justice, la vérité, le peuple, le temps...) conduit à formuler un ou des problèmes qui s'imposent nécessairement. La lecture des philosophes n'a pas d'autre intérêt que d'éclairer la réflexion, et de l'aider à aborder ces problèmes.



    3- Le programme de la saison 2023-2024



    • Les séances sont accompagnées d'un plan et enregistrées. L'enregistrement est accessible aux adhérents

    • Le thème : Le Temps

    • L'oeuvre : Les chapitres 41 et 44 du Monde comme volonté et comme représentation de Schopenhauer regroupés sous le titre : Métaphysique de la mort, métaphysique de l'amour, en 10/18

    • Les 5 premières séances  Mardi 19 septembre, Mardi 3 octobre, Jeudi 12 octobre, Jeudi 9 novembre, Mardi 21 novembre (voir le calendrier sur le site de PHILOPOP



    4- L'émission mensuelle des Rendez vous de PHILOPOP sur Ouest track radio (podcastée et accompagnée d'un plan)


    Montrer comment la lecture d'une oeuvre philosophique permet d'éclairer une question d'actualité et d'y réfléchir


    5- Venez nombreux à la conférence donnée par PHILOPOP  le 21 octobre à 10h30 à la Bibliothèque Niemeyer du Havre:


    "Les philosophes français des Lumières face à la traité négrière et à l'esclavage colonial"

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    33 m
  • Les Rendez-vous de Philopop - Vers une terre inhabitable ?
    Jun 18 2023
    Vers une terre inhabitable ?L'anthropocène 40 experts ont alerté récemment dans la revue Nature du franchissement de 7 des 8 lignes rouges planétaires au delà desquelles la terre risque de devenir inhabitable. Comment expliquer qu'on en soit arrivé là ? A-t-on affaire à un processus fatal ? Peut-on l'enrayer et en atténuer les effets, et si c'est le cas, de quelle manière ?Pour décrire la situation nouvelle à laquelle l'humanité est désormais confrontée, deux scientifiques, Eugène Stoermer et Paul Crutzen, tous deux spécialistes du climat, ont proposé d'ajouter une 3ème ère au quaternaire (après le pléistocène et l'holocène) qu'ils décident de nommer anthropocène (c'est à dire l'ère de l'humain) parce qu'elle est marquée par l'impact des actions humaines 1- En quoi l'hypothèse de l'anthropocène paraît-elle pertinente pour désigner la nouveauté et la gravité des transformations en cours (réchauffement climatique, érosion massive de la biodiversité planétaire, acidification des océans, pollution des eaux, des airs et des sols...) ?On ne peut plus s'en tenir aux idées de crise écologique et de développement durableL'hypothèse proposée constitue l'humanité en force géologique : pour la 1ère fois dans l'histoire de la planète, une époque géologique serait définie par la capacité d'action d'une espèce, l'espèce humaineCette hypothèse conduit à mettre en cause la séparation établie par la modernité entre la nature et l'histoire humaine (voir l'introduction à l'histoire universelle de Michelet, et la préface de Condorcet à l'Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain)L'homme ne peut plus considérer la nature comme un milieu extérieur prévisible dont il peut connaître les lois et qu'il peut soumettre à ses techniques, il devient partie prenante de l'histoire de la terre en risquant par son activité de la détruire comme espace habitable.2- L'hypothèse de l'anthropocène est-elle légitime ? L'humanité est-elle vraiment en train d'écrire une page entièrement neuve de l'histoire de la planète ? N'est-ce pas là surévaluer l'importance de son activité ?Distinguer avec Philippe Descola (article de la revue Esprit de 2015, Humain, trop humain?) le phénomène général d'anthropisation (exemple d'une altération écosystémique régionale par l'intervention continue des Amérindiens sur la flore de la forêt amazonienne) de l'anthropocène en tant que transformation globale et accélérée du système de la terre depuis un peu plus de 2 siècles. 3- A quel type d'action doit conduire le diagnostic d'anthropocène ?a- Le projet d'une « géo-ingénierie » planétaire et l'idée d'une « gouvernance environnementale globale » (selon la formule de John Kerry, envoyé spécial du président des USA pour le climat, en 2014) :l'anthropocène apparaît dans cette perspective comme l'âge de la domination de l'homme sur la planèteau lieu d'admettre les limites de la technique humaine et ses conséquences involontaires, ce projet revient à s' illusionner sur sa puissance en s'imaginant trouver en elle le remède aux maux engendrés par le développement industrielb- Une nouvelle conception du rapport de la technique à la nature, pour laquelle la nature n'est plus entièrement prévisible en ce qu'elle est constituée par un système d'interactions de plusieurs processus naturels dans lequel s'insère l'activité humaine. L'anthropocène est l'entrée dans un monde incertain. 4- La question des responsabilités : le caractère politiquement discutable de la notion d'anthropocèneParler d'anthropocène, c'est rendre l'humanité dans son ensemble responsable de la dégradation de la situation environnementale. S'il est vrai que la notion est pertinente dans la mesure où désormais tous les peuples sont affectés, elle dissimule toutefois deux injustices :le fait que les différentes populations du monde n'ont pas participé à part égale au processus de l'anthropocène (c'est pourquoi des historiens lui préfèrent la notion de « capitalocène »)le fait que ce sont celles qui y ont le moins contribué qui sont aujourd'hui les plus exposées à ses conséquences (inondations, montée des océans, sécheresses etc)Les inégalités et les injustices ne sont-elles pas un obstacle considérable pour lutter résolument contre les effets de l'anthropocène ?Bibliographie : L'événement anthropocène, par Christophe Bonneuil et Jean Baptiste Fressoz, collection Points/ SeuilPenser et agir avec la nature, par Catherine et Raphaël Larrère, édition La Découverte
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    53 m
  • Les Rendez-vous de Philopop - Sur la fragilité de la vérité dans l'espace politique
    May 21 2023

    Sur la fragilité de la vérité dans l'espace politique


    Sommes-nous entrés dans une ère où la vérité n 'a plus de valeur, où prolifèrent les « fake news » et les « faits alternatifs », une ère de la « post-vérité » ?


    Pourquoi la vérité s'avère-t-elle si fragile, pas seulement dans les tyrannies mais aussi dans les démocraties ? En quoi sa destruction met-elle en péril la vie publique elle-même ? Réflexion à partir de la lecture de deux essais d'Hannah Arendt, « Vérité et politique » (1965), et « Du mensonge en politique » (1972)

    1- Le conflit de la vérité de fait et de la politique « se produit aujourd'hui sous nos yeux à une vaste échelle ». Comment expliquer l'hostilité qui menace la première ?


    a- Sa vulnérabilité tient d'abord à sa contingence (il est facile de faire disparaître le nom de Trotsky des livres d'histoire de la Russie soviétique ; « les faits et les événements sont choses infiniment plus fragiles que les axiomes (…) produits par l'esprit humain »).


    b- Les faits et les événements menacés « constituent la texture même du domaine politique » qu'un pouvoir politique veut réarranger à son profit en les falsifiant et en les effaçant.


    c- Les trois modes d'effacement de la vérité de fait :




    • Sa destruction matérielle (effacement des traces d'un fait ou d'un événement)




    • L'interdiction de son accès à un statut public qui peut être le fait d'une large partie de l'opinion publique dans une démocratie (voir les polémiques contre son livre Eichmann à Jérusalem, 1963)




    • Sa transformation en opinion (cas uniquement des démocraties)





    2- La vulnérabilité des vérités de fait exposées à être transformées en opinions (démocraties)


    a- Les vérités de fait se trouvent dans une situation paradoxale :


    - Comme les opinions, elles sont « politiques par nature » en ce qu'elles s'inscrivent dans la pluralité. « La vérité de fait est toujours relative à plusieurs » : elle concerne des événements dans lesquels plusieurs se sont engagés ; elle est établie par des témoignages et repose sur des témoignages ; elle est partagée dans des récits communs.


    - Contrairement aux opinions, elles s'imposent sans discussion une fois qu'elles sont établies et déclarées comme vraies


    b- Les vérités de fait se distinguent des opinions et des interprétations par leur « matière factuelle » qui ne peut pas être modifiée, contrairement aux interprétations et aux récits qu'on peut en faire (voir la réponse de Clémenceau : « Ce dont je suis sûr, c'est que les historiens futurs ne diront pas que la Belgique a envahi l'Allemagne »)


    c- Loin de conduire au rejet ou à la mise à l'écart des vérités de fait, la nature représentative de la pensée politique exige au contraire leur respect et leur préservation : « La liberté d'opinion est une farce si l'information des faits n'est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l'objet du débat ».



    3- Les effets destructeurs du mensonge politique moderne


    Là où le mensonge traditionnel cachait, le mensonge moderne détruit.


    a- Le mensonge dans les régimes totalitaires




    • Le mensonge y est comme « un premier pas vers le meurtre » (exemple de Trotsky)




    • En détruisant la vérité, il détruit tout espace public qui permette le partage des expériences




    b- La manipulation des masses dans les démocraties modernes : l'exemple du mensonge par fabrication d'une image en direction de la population (d'un storytelling d'Etat) qui permet d'écarter les faits dérangeants en les traitant comme des opinions négligeables et de leur substituer une autre réalité justifiant notamment la poursuite de la guerre au Vietnam (« Du mensonge en politique », 1972)

    Conclusion :


    La nécessité de contre-pouvoirs (une presse indépendante, des lanceurs d'alerte : Daniel Ellsberg, Julian Assange, Chelsea Manning, Edward Snowden … ) pour révéler les manipulations des gouvernements, signaler les atteintes à l'intérêt général, et permettre un vrai débat politique

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