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  • La Tunisie dans l’automne de ses libertés
    Oct 4 2024

    Les atteintes à la liberté d’expression se multiplient en Tunisie à l’occasion des élections présidentielles de ce dimanche, dont le président sortant Kaïs Saïed est le grand favori.

    Pour qui se souvient des espoirs que la révolution de Jasmin avait engendré, en 2011, avec ses agoras citoyennes sur l’avenue Bourguiba de Tunis et son printemps des blogs, la Tunisie de Kaïs Saïed ressemble à un automne des libertés publiques, et en particulier pour les journalistes et les médias.

    En mai dernier, une journaliste de France 24 et son caméraman avaient filmé en direct l’arrestation brutale de l’avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani qui a depuis été condamnée en appel à huit mois de prison ferme. En vertu du décret-loi 54 de 2022 sur la « diffusion de fausses nouvelles », elle s’était rendue coupable – selon la justice tunisienne – de propos jugés critiques à l’égard du président. Comment ? Eh bien en ironisant sur la théorie du grand remplacement à la tunisienne alors que Kaïs Saïed avait fustigé des « hordes de migrants subsahariens » et un « complot » pour changer la démographie de la Tunisie. « Mais de quel pays extraordinaire parle-t-on », avait demandé l’avocate sur un plateau de télévision. Quelques jours après, elle était arrêtée.

    Une dégringolade de 48 places au classement mondial de RSF

    Reporters sans frontières a alors parlé d’« escalade répressive » à l’encontre des journalistes. Car en effet, les images où l’on voit l’équipe de France 24 bousculée par les services de sécurité ne sont rien à côté de la réalité que vivent les médias tunisiens. Alors qu’une vingtaine de journalistes et une quarantaine d’avocats et de figures politiques ont été poursuivis sur la base du décret 54, selon le syndicat des journalistes tunisiens, deux chroniqueurs de la radio IFM et de la chaîne Carthage+, Bohren Bsaïes et Mourad Zeguidi, ont été condamnés à un an de prison.

    Le motif est toujours le même : la diffusion de fausses nouvelles. Mais pour avoir refusé de livrer leurs sources sur une opération antiterroriste, comme l’ont fait Noureddine Boutar et Khalifa Guesmi, de Mosaïque FM, la peine peut aller jusqu’à cinq ans de prison. Sans compter les intimidations et les coups pendant les manifestations. Comme dit l’humoriste exilé Lofti Abdelli à France 24, « On est le seul peuple arabe qui peut dire : "on est en dictature" ».

    Dérive autoritaire

    Et de son côté, le président Saïed ignore la presse. C’est bien simple : il ne fait pas campagne, il se refuse absolument à répondre aux journalistes et il ne participe à aucun débat télévisé, à la différence de sa première candidature lors de l’élection de 2019. Dans le plus pur style populiste, le président rejette toute forme d’intermédiation avec des journalistes et entend parler directement au peuple sur les réseaux sociaux. C’est du reste sur ces réseaux que viennent, le plus souvent, la désinformation et les campagnes contre la presse.

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  • Au Sahel, la crainte d'un «trou noir de l'information»
    Sep 27 2024

    En Afrique de l'Ouest, la crainte d'un « trou noir de l'information » est ravivée cette semaine par un appel de plus de 500 radios locales du Sahel.

    L'expression « trou noir de l'information » est de Reporters sans frontières (RSF), et Sadibou Marong, le directeur du bureau Afrique de l'organisation, l'a réitérée mardi, après avoir recueilli la signature des responsables de 547 radios communautaires. Avec une vingtaine de directeurs de ces radios présents à Bamako, RSF lance un appel aux autorités des pays du Sahel où sévissent des bandes armées ainsi que des groupes jihadistes.

    Au Mali, au Niger, au Burkina Faso et dans certaines zones du Tchad, ils demandent d'abord qu'on ouvre des enquêtes sur deux journalistes de ces radios tués ces derniers mois, Abdoul Aziz Djibrilla et Idriss Yaya. Ils demandent aussi qu'on agisse pour obtenir la libération de quatre d'entre eux qui ont été enlevés, notamment deux reporters de Radio Coton d'Ansongo, au Mali. Les radios communautaires, qui diffusent en langues locales, sont souvent l'un des rares vecteurs d'information. Et les protéger, reconstruire leurs locaux quand ils sont détruits ou reconnaître leur rôle dans les législations devraient être, selon RSF, une priorité.

    À lire aussiSadibou Marong (RSF): «Les journalistes des radios communautaires paient un lourd tribut dans la région du Sahel»

    Un journaliste de France 24 poursuivi au Niger

    Du côté des médias internationaux, les poursuites engagées contre Wassim Nasr, un journaliste de France 24, témoignent aussi d'une volonté d'empêcher toute information indépendante. Dans un communiqué, le procureur de la République du Niger, qui a ordonné l'ouverture d'une enquête contre ce journaliste, tout en saluant « le professionnalisme et la bravoure des Forces de défense de la Confédération des États du Sahel », reproche à Wassim Nasr des « commentaires tendancieux au lendemain de chaque attaque terroriste » qui sont assimilés à « des actes de publicité et de soutien flagrant aux terroristes ».

    Bien sûr, France 24 dénonce ces accusations concertées avec le Mali et le Burkina Faso et exprime son soutien à son journaliste, qui travaille dans le respect des règles professionnelles, c'est-à-dire en recoupant ses sources au lieu de lire les communiqués du pouvoir.

    Car après les arrestations arbitraires et l'éviction de médias internationaux comme RFI, France 24 ou TV5, le but est bien d'imposer l'autocensure. Le « trou noir de l'information » n'empêche pas les Africains ayant accès au numérique de s'informer, ainsi qu'en attestent les 4,4 millions d'abonnés à la chaîne WhatsApp de France 24. Mais il empêche les gens situés dans les zones les plus reculées, là même où diffusent les radios communautaires, d'être informés et de garder un lien avec l'extérieur. C'est précisément ce que souhaitent les jihadistes qui ne veulent pas voir questionnés leur idéologie et leurs actes.

    À lire aussiLe Sahel central, «l’un des plus gros trous noirs de l’information»

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  • Netflix: toutes les annonces des séries et films à venir sur la plateforme américaine
    Sep 20 2024

    À l'occasion de ses 10 ans de présence dans l'hexagone, tour d'horizon des séries à venir sur la plateforme américaine.

    À son lancement en France en septembre 2014, Netflix était déjà précédée de sa réputation de plateforme mondiale. Et pourtant, cela n'avait pas empêché ses promoteurs d'offrir un abonnement de trois mois aux journalistes pour les inciter à plonger dans son univers et découvrir des séries comme Orange is the New Black, House of cards puis des créations européennes comme la Casa de Papel ou Marseille, sa première série française dès 2016.

    Aujourd'hui, en France, Netflix dénombre une vingtaine de contenus originaux par an, dont Lupin avec Omar Sye, Tapie avec Laurent Laffite ou, dernièrement, le fameux Sous la Seine, ce film de requin, sorti au moment des Jeux olympiques, déjà vu plus de 100 millions de fois.

    La plateforme est obligée d'investir 20 % de son chiffre d'affaires en France dans la création audiovisuelle, soit 250 millions d'euros, c'est-à-dire dans les séries, mais aussi les films et les documentaires. Elle compte 10 millions d'abonnés français, mais dispose, depuis un an, d'une petite particularité : sa formule de base, à près de six euros, contient de la publicité. Alors qu'il fallait débourser huit euros pour l'abonnement standard sans pub il y a dix ans, il faut compter 13,5 euros désormais.

    Netflix France a présenté au Festival de fiction de La Rochelle, la semaine dernière, ses prochaines créations qui n'échappent pas à la grande tendance du moment, à savoir « le thriller d'époque ». Exemple avec une saga de l’été Qui sème le vent, sur un meurtre dans une exploitation florale avec Isabelle Adjani et Ava Baya.

    Mais on peut citer aussi Les lionnes, l’histoire de quatre Marseillaises vivant dans la misère qui décident de faire un braquage, la série GIGN avec Tomer Sisley, ou encore Bandi d’Eric Rochant sur une famille martiniquaise qui bascule dans le monde des gangs et de la drogue. Au fond, les séries veulent refléter les angoisses de la France d’aujourd’hui, ce qu’on voit aussi dans Cimetière indien, de Canal+, sur des assassinats commis à trente ans d’intervalle au nord de Marseille, dans une France péri-urbaine sur fond de racisme et d’islamisme.

    Même Fortune de France, sur France 2, adaptation d’un livre de Robert Merle sur les guerres de religions au XVIème siècle, résonne avec une certaine actualité en raison de l’intolérance qu’elle met en scène. L’autre grande veine de la fiction française est sociale avec notamment, pour France 2, Signalements, sur l’enfance maltraitée, ou À l’épreuve qui suit le destin d’une femme seule contrainte de devenir éboueuse pour élever son enfant.

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  • Des États généraux de l’information inspirants et critiqués, loin des promesses initiales
    Sep 13 2024

    Réunis à la demande du président français Emmanuel Macron, les États généraux de l’information viennent de rendre leurs conclusions, jeudi 12 septembre 2024, après onze mois de travaux.

    C'est par un rapport de 350 pages que se sont soldés ces États généraux présidés par Bruno Patino, le patron d'Arte, qui les a repris après la démission de Bruno Lasserre, et plus encore après la mort brutale de Christophe Deloire, l'ancien dirigeant de RSF.

    Pour Bruno Patino, le plus important est sans doute que ce rapport, issu de 174 auditions et d'assemblées citoyennes, permette de défendre des vérités factuelles, donc le journalisme, face à ces contre-vérités qui minent le débat public. On l'a encore vu cette semaine lorsque Donald Trump a affirmé que les migrants mangeaient des chiens et des chats dans l'Ohio ou qu'ils affluaient par millions des prisons et des asiles d'aliénés. Lorsque le journaliste a rétabli les faits, il a été accusé par le candidat républicain d'être de parti pris.

    Que préconise le rapport ?

    Il s'agit d'abord de lutter contre la désinformation en favorisant une information de qualité sur les réseaux par un label de fiabilité, auquel souscriraient les médias, et qui pourrait être privilégié dans les algorithmes, tant auprès du public que des annonceurs. C'est tous le sens de la Journalism Trust Initiative, promue par RSF, qui se félicite également que le rapport reprenne ses mesures sur la protection du secret des sources et la législation contre les procédures bâillons qui visent à faire taire les journalistes. Le rapport suggère aussi qu'une partie de la taxe sur les services numériques, la fameuse taxe GAFA, soit affectée à l'information.

    Un rapport critiqué

    Carine Fouteau de Mediapart lui reproche d'oublier « les vrais ennemis du droit de savoir » que sont les acteurs politiques et économiques. Le rapport refuse de recommander un droit d'agrément des rédactions à la nomination de leur directeur, comme cela existe au Monde ou aux Échos, alors que c'est ce que réclamaient les journalistes en grève du JDD après le rachat de leur titre par Bolloré et l'imposition d'un directeur venu de Valeurs actuelles.

    À la place, le rapport suggère que soient mis en place des comités d'éthique paritaires où pourront être discutés les choix de l'actionnaire, ce qui ne risque pas de le dissuader beaucoup, même si est retenue l'idée de faire des présidents de sociétés de journalistes des salariés protégés. Mais ce qui est recherché, c'est un équilibre entre le droit à l'information et le droit d'entreprendre. Il revient maintenant au gouvernement d'arbitrer ce « rapport Macron-compatible » qui n'en contient pas moins des pistes d'amélioration.

    À écouter aussiDes états généraux de l'information pour «sensibiliser les citoyens contre les ingérences étrangères»

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  • Le double visage de Telegram, l'application controversée de Pavel Durov
    Sep 6 2024

    L’application cryptée dont le fondateur, Pavel Durov, a été mis en examen en France, est à la fois un canal de diffusion pour des médias et un outil de trafics criminels. Décryptage.

    C’est toute l’ambivalence de cette messagerie d’origine russe, qui est à la fois plébiscitée par l’opposition anti-Vladimir Poutine, car elle permet de diffuser de l’information non officielle, et qui est en même temps exploitée par des groupes de trafiquants ou de criminels, des déviants sexuels voire des réseaux terroristes. Dans l’univers des médias, Telegram est aussi du côté des pirates : elle diffuse des images sans payer de droit d’auteur et retransmet par exemple en France les matchs de la Ligue 1, profitant du prix élevé des abonnements.

    C’est d’ailleurs bien plus qu’une messagerie, plutôt une sorte d’internet crypté avec ses chaînes vidéo, ses espaces d’échange de fichiers, ses jeux vidéo, ses sites de paris et sa cryptomonnaie. Telegram s’est engagé à ne jamais révéler l’identité de ses utilisateurs ou de ses abonnés, et c’est pour cette raison que son patron est appréhendé par la justice, au vu des infractions pénales constatées.

    Un média non censuré

    Pavel Durov s’est exprimé jeudi 5 septembre sur Telegram pour dire qu’il supprimait « des millions de messages et de chaînes nuisibles chaque jour ». On peut en douter, mais c’est peut-être vrai si Telegram a une super IA qui permet de prohiber certains contenus. Une chose est sûre, c’est qu’elle n’a pas les équipes de modérateurs des grandes plateformes. Pour une raison simple : son modèle économique repose sur sa réputation d’espace libertarien non censuré, sans modération et l’absence de données personnelles.

    On peut d’ailleurs noter que Telegram vit non seulement de ses abonnés, mais aussi de la publicité. Avec un détail : il n’y a aucun ciblage sur les données personnelles, les publicités ne sont adressées que sur la base des thématiques ou des univers visités.

    Une application populaire en Russie

    Telegram est donc un outil précieux dans les régimes autoritaires. On le voit en Russie où Telegram est la première source d’information non censurée. Alexeï Venediktov, le patron de l’emblématique radio Echo de Moscou, a sa chaîne Telegram, avec 200 000 abonnés. Or, il est bien clair que c’est parce qu’il n’est pas sous le contrôle du Kremlin que ce média qui a critiqué l’invasion de l’Ukraine, qui est sur la liste des agents de l’étranger, utilise l’application. Du reste, l’Ukraine et Volodomyr Zelensky l’utilisent aussi. Et on a vu en Iran que c’est entre autres par Telegram que les militants d’opposition s’échangent des informations. « Une grammaire de la liberté contre l’État qui se heurte à notre grammaire civique » en Europe, comme dit Françoise Daucé dans Le Monde.

    À lire aussiPavel Durov, patron de Telegram, réagit pour la première fois depuis son interpellation

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  • Élections au Royaume-Uni: Keir Starmer, le bien aimé de la presse conservatrice
    Jul 5 2024

    Jeudi 4 juillet, le Labour, le Parti travailliste, emmené par Keir Starmer, a largement remporté les élections législatives au Royaume-Uni, gagnant 410 circonscriptions sur 650, au détriment des conservateurs de Rishi Sunak. Le nouvel homme fort du pays a pu bénéficier pendant sa campagne du soutien massif des médias.

    Quel est le point commun entre des journaux aussi différents que le Sun, le Sunday Times, The Economist ou le Financial Times ? Ce sont tous des journaux pro-Starmer, le nouveau Premier ministre du Royaume-Uni. Pourtant, l'homme n'est pas un bon client des médias ou une figure haute en couleur à la Boris Johnson, c'est même tout le contraire. On le disait un brin austère, sérieux, mais sans charisme, une sorte de figure inversée du flamboyant Tony Blair.

    Keir Starmer, un homme très différent de son prédécesseur, le millionnaire Rishi Sunak

    Keir Starmer, ancien avocat aux droits de l'Homme entré en politique il y a dix ans, a fini par fendre son armure à la télévision. C'est ainsi qu'il a raconté son histoire familiale dans le sud-est de Londres : fils d'un tourneur fraiseur et d'une infirmière atteinte d'une grave maladie auto-immune, il sait ce que sont les problèmes de santé et de pouvoir d'achat. Il a même confié pendant la campagne qu'il avait bien connu la crainte des factures déposées dans la boîte aux lettres et qu'il savait ce qu'il fallait couper si on ne pouvait pas payer — le téléphone, car « c'était toujours plus facile de s'en passer ». Évidemment, le Sun, tabloïd populaire, y a vu un candidat en résonance avec une bonne partie de son lectorat. D'autant qu'il s'est engagé à faire baisser l'immigration.

    Ce qui séduit les journaux très libéraux et libre-échangistes comme The Economist, voire plus conservateurs comme le Financial Times et le Sunday Times, c'est le mauvais bilan de Rishi Sunak. « Cette génération de Tories [les conservateurs] a ruiné sa réputation de parti des affaires », dénonce le Financial Times, selon lequel « Keir Starmer est mieux placé pour être le dirigeant dont le pays a besoin », même si le journal craint tout de même l'interventionnisme réglementaire d'un gouvernement travailliste. Quant à The Economist, il a aussi appelé à voter pour le Labour en constatant un manque cruel de croissance économique.

    Keir Starmer, en se disant favorable aux entreprises et à la création de richesses, comme aux travailleurs, plaît aux patrons. Il est aussi celui qui a liquidé l'héritage de Jeremy Corbyn en réglant les questions d'antisémitisme au sein de son parti et en prenant position pour Israël après le 7-Octobre, demandant juste des « pauses humanitaires à Gaza ». Sur le fond, et non sur la forme, il y a beaucoup de points communs avec Tony Blair qui avait, lui aussi, reçu le soutien de la presse de Rupert Murdoch à laquelle appartient le Sunday Times.

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  • Les journalistes de «Marianne» mobilisés contre leur rachat par un proche de l'extrême droite
    Jun 28 2024

    À l'hebdomadaire Marianne, les journalistes sont vent debout contre un projet de rachat du titre de presse par un riche entrepreneur, Pierre-Édouard Stérin, dont des liens forts avec l'extrême droite ont été révélés.

    C'est dans Le Monde que les journalistes de Marianne ont appris que Pierre-Édouard Stérin, un milliardaire catholique anti-IVG de 50 ans, avait une très grande proximité avec le Rassemblement national.

    Son bras droit, François Durvye, patron de son fonds d'investissement Otium, a conseillé le parti d'extrême droite pour son programme économique. Un autre lieutenant de Pierre-Édouard Stérin, Alban du Rostu, qui dirige son fonds philanthropique Bien commun, a proposé ses services pour les investitures. Enfin, et c'est une révélation du magazine Challenges, Pierre-Édouard Stérin et François Durvye ont racheté en novembre pour 2,5 millions d'euros la propriété familiale des Le Pen à Rueil-Malmaison, où vit encore Jean-Marie Le Pen.

    Suite à ces informations, les journalistes ont décidé à l'unanimité de faire grève le vendredi 28 juin. La grève a été levée au soir, les journalistes maintiennent toutefois la pression.

    La société des rédacteurs fait volte-face

    Dans un précédent communiqué en date du 21 juin, approuvé par plus de 60% des journalistes, les garanties d'indépendance, comme un droit de véto sur la nomination du directeur de la rédaction ou un représentant au conseil d'administration, semblaient alors suffisantes.

    Le 21 juin, la rédaction de Marianne avait pourtant déjà connaissance de l'affaire de l'achat de la maison des Le Pen à Rueil-Malmaison ou la participation de Pierre-Édouard Stérin à la production du film du Puy du Fou Vaincre ou Mourir, avec Studio Canal, contrôlé par Bolloré.

    Mais avec l'article du Monde, dixit la Société des rédacteurs : « ce qui apparaissait comme un engagement idéologique individuel se révèle être une entreprise partisane ».

    Le vendeur, Daniel Kretinsky, a décidé vendredi 28 juin de suspendre ses négociations

    Les négociations pour le rachat de Marianne ont été suspendues en accord avec Pierre-Édouard Stérin, et ce, jusqu'au 21 juillet où les parties statueront. Mais Denis Olivennes, le patron de CMI qui représente Marianne, n'a pas l'air d'opposer une digue républicaine à ce rachat. Il y a bien une proposition alternative de l'entrepreneur Jean-Martial Lefranc, mais elle ne dépassait pas hier 5 millions d'euros, ce qui semblait insuffisant.

    Daniel Kretinsky avait décidé de mettre en vente Marianne après avoir estimé qu’il ne se retrouvait pas dans la ligne éditoriale critique vis-à-vis de l’Union européenne et du libéralisme.

    Les journalistes de l'hebdomadaire craignent de vivre une situation déjà connue à iTélé devenue CNews, Europe 1 ou au Journal du dimanche, quand la quasi-totalité de la rédaction avait fui suite à la reprise par Bolloré et une orientation de ces médias à l'extrême droite.

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  • TV5Monde devient «média non grata» au Burkina Faso
    Jun 21 2024

    Le Burkina Faso a interdit ce mardi 18 juin la diffusion de TV5Monde pendant six mois.

    Après RFI, France 24, Le Monde, LCI, Jeune Afrique, c’est au tour de TV5Monde d’être suspendu pour une période assez longue - six mois - au Burkina Faso. Avec en plus une amende de 50 millions de francs CFA, soit 76 000 euros.

    Ce qui fâche est toujours et encore la remise en cause de la situation sécuritaire et militaire du pays, depuis le coup d’État du capitaine Ibrahim Traoré en octobre 2022. Cette fois, il est reproché des « propos tendancieux », sur l’antenne, de Newton Ahmed Barry. Ce journaliste et ancien président de la Commission électorale s’est exprimé au cours du journal télévisé de TV5 notamment sur l’attaque jihadiste meurtrière de Mansila, dans le nord-est du pays, près du Niger.

    Alors que plusieurs dizaines d’instructeurs russes sont arrivés du Mali à Ouagadougou, il s’agit aussi de discréditer les rumeurs de mutinerie et de « mouvements d’humeur » apparues sur les réseaux sociaux. « Il n’en est rien », assure l’armée, qui a toutefois la plus grande peine à justifier comment un obus a pu arriver dans la cour de la télévision publique, à deux pas de la présidence. Un « incident de tir », selon la chaîne d’État.

    Et cette suspension prend un tour particulier compte tenu de la nature de TV5Monde. Car TV5, ce n’est pas la France, même si Paris pourvoit majoritairement à son budget. C’est une chaîne francophone où l’on retrouve les télévisions de Belgique, du Canada ou de Suisse. Yves Bigot, le patron de la chaîne qui vient d’abandonner ses fonctions faute d’être reconduit, avait même l’intention d’ouvrir son capital à sept pays africains. Le 6 juin, il a signé avec la société des journalistes de la chaîne une charte éditoriale qui garantit qu’elle se conforme au journalisme « trust initiative », un label international de qualité de l’information.

    Ingérence du pouvoir dans les médias

    Un label auquel ont souscrit aussi RFI et France 24. Et au Burkina Faso, on observe un contrôle accru des médias. Il suffit de regarder qui porte la charge contre TV5 : ce n’est pas directement le gouvernement, mais le régulateur, le Conseil national de la communication, qui depuis une réforme de novembre dernier est la voix du pouvoir dans les médias. Cette suspension de six mois fait suite à l’interdiction pendant un mois de Radio Omega, à des expulsions de journalistes, comme celle du Monde et de Libération qui avait parlé d’une « guerre de propagande » avec les groupes jihadistes. On voit aussi des officines proches du pouvoir organiser des campagnes de dénigrement contre des journalistes burkinabè.

    Au fond, quand la sécurité du pays n’est plus sous contrôle, on tente de contrôler les messagers.

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