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 J'ai cru connaître l'astral, j'ai cru connaître ce monde aux facettes d'or, de nacre, de corail. Je pensais avoir accompli le tour du grand refuge de l'âme alors que je n'avais fait qu'entrouvrir sa porte... Dehors, la nuit tombait. Elle s'allongeait sur le sol de bitume d'une petite ville qu'un printemps tardif n'était toujours pas parvenu à réchauffer. L'un après l'autre, les grands réverbères célestes s'allumaient. Les grands réverbères! Ces mots se sont aventurés sous ma plume, mais quelle dérision!

Désormais, dans notre grotte de pollution, les grands réverbères ne daignaient plus montrer que leur terne reflet Combien de fois pourtant, hors de mon corps, ai-je pu contempler toute leur tranquille magnificence! Combien de fois également ne me suis-je pas remémoré les paroles de l'être au visage bleu m'exhortant à ne pas quitter inconsidérément mon habit de chair? «Ton corps est un temple, disaient-elles. Prends soin de lui autant que de ton âme. Il n'est qu'un reflet, niais un reflet ne doit-il pas briller à la mesure de ce qui lui donne vie, de ce qui se trouve à sa source? «Tu ne saurais mépriser une image sans faire rejaillir une goutte de dédain sur son créateur.»

Ce soir-là, cependant, il fallait que je laisse derrière moi ma tunique d'os et de muscles. Il me fallait aller bien plus haut et bien plus loin que les énormes champignons d'ammoniac et de soufre bondissant des cheminées d'usine. Mon épouse m'accompagnait. Nous devions partir et apprendre une fois de plus. Notre guide désirait notre présence autant que nous espérions la sienne. Il nous fut aisé de quitter notre monde ; l'astral et sa vie vinrent vers nous avec douceur, comme les simples prolongements naturels de nos trois dimensions. Cela ne faisait qu'un tout, à n'en pas douter ; une seule vie répartie de part et d'autre d'un miroir à deux faces.

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