• À jamais, le sphinx fait silence…

  • May 25 2024
  • Length: 5 mins
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À jamais, le sphinx fait silence…  By  cover art

À jamais, le sphinx fait silence…

  • Summary

  • Henri Konan Bédié a, toute sa vie durant, travaillé pour son pays, sans jamais être fonctionnaire. L’homme que pleurent les Ivoiriens était-il aussi exceptionnel que le disent les éloges ? En Côte d’Ivoire, les hommages à Henri Konan Bédié n’en finissent pas, et certains de ceux qui ont compté parmi ses pires détracteurs vantent aujourd’hui les qualités exceptionnelles de l’homme d’État qu’il était. Faut-il se réjouir de l’unanimité retrouvée autour de l’ancien président, ou sourire de l’hypocrisie de certains de ceux qui le pleurent, après ne lui avoir jamais fait aucun cadeau de son vivant ?Peut-être ont-ils compris à quel point il est vain d’exiger en permanence des autres d’être des héros parfaits, alors que l’espèce humaine cumule, à l’excès, imperfections, défauts et tares. Dans un monde où certains aiment prêter leurs propres mesquineries aux autres, le temps du deuil commande à chacun la décence de tempérer son intransigeance, pour juste apprécier si le bien fait par celui qui n’est plus peut suffire à racheter le mal qu’il a pu faire à son peuple, ou à rattraper les erreurs qu’il a pu commettre. Les superlatifs dithyrambiques que l’on déverse aujourd’hui devant la dépouille de Henri Konan Bédié sont peut-être l’expression de ce que ses concitoyens retiennent de sa vie publique, sans doute imparfaite, au regard de six décennies d’indépendance, avec, tout de même, cinq chefs d’État successifs.Les Ivoiriens l’appelaient « Le sphinx ». Était-ce pour ses silences, son calme ou les mystères qu’il emporte ?Pendant douze longues années, il a été président de l’Assemblée nationale et dauphin constitutionnel du président Houphouët-Boigny. Pour s’y être cru trop tôt, son prédécesseur dans cette position a été, politiquement parlant, subtilement exécuté. Bédié a su ne pas exaspérer un président qui pouvait, à tout moment, abréger cette espèce de viager politique. Depuis des années, il s’abstenait de parler publiquement. En janvier 1993, j’avais commis l’erreur de titrer un long portrait dressé de lui en introduction à une interview qu’il nous avait accordée à Jeune Afrique Économie : « Le sphinx parle. » Il n’était sphinx que par rapport aux douze années de prudence… Depuis, ses concitoyens l’appellent, à tout propos, « le sphinx de Daoukro ». Il parlait pourtant dans l’hémicycle !Il était calme et mesuré et, pour avoir beaucoup reçu de la vie, il n’a voir pas dû, comme certains, se battre violemment pour tout. Et il n’était pas prêt à tout pour parvenir à ses fins, et cela est plus que respectable. Né dans une famille de prospères planteurs de café et cacao, il n’a probablement jamais manqué de rien. Tout cela, ajouté à une éducation doublement princière, explique son assurance dans la vie, et la sérénité qui allait avec.À lire aussiHommage à Henri Konan Bédié en Côte d'Ivoire: début des cérémonies à la résidence de CocodyMais Henri Konan Bédié n’était pas d’une docilité parfaite. Le jeune homme qui défiera les lois ségrégationnistes aux États-Unis en allant déjeuner en 1960 dans les restaurants interdits aux Noirs rêvait de devenir avocat, alors que l’administration coloniale finissante l’avait programmé pour l’enseignement. Aussi, lorsqu’après le bac, en 1953, il est envoyé à l’École normale William Ponty, à Sébikotane, il prend bien le bateau pour le Sénégal, mais avec la ferme intention de déserter. Trois jours plus tard, avec une partie du pactole prélevé sur les revenus familiaux de café et cacao, il s’offre, à Dakar, un billet d’avion pour Paris. Destination : Poitiers, la ville de ses rêves estudiantins. Après une licence en droit, un diplôme d’études supérieures en droit et un autre en économie, puis le certificat d’aptitude à la profession d’avocat, il est rappelé, en 1958, comme sous-directeur de la Caisse de compensation et des prestations familiales dans une Côte d’Ivoire alors régie par la loi-cadre de Gaston Deferre. Six mois plus tard, il repartait pour un stage au Quai d’Orsay, puis un autre à l’ambassade de France à Washington, d’où, en 1960, il bascule au poste spécialement créé de chargé d’affaires de la Côte d’Ivoire indépendante. Il est à New York, pour présenter la candidature de son pays à l’ONU… Au cœur de l’Histoire, en somme.Pourquoi présente-t-on la visite de Félix Houphouët-Boigny à Washington, en 1962, comme déterminante dans sa carrière ? Pour sa part dans la réussite de cette visite. C’est à cette occasion que Houphouët-Boigny le présente personnellement à Robert Kennedy, ministre de la Justice dans l’administration de son frère John, en lui demandant de l’inviter en famille et de l’introduire au gotha économique et financier américain, « parce qu’il viendra un ...
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