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  • Kaja Kallas, la «dame de fer» de l’Estonie à la tête de la diplomatie européenne
    Jul 6 2024
    C’est elle qui a été choisie pour incarner la diplomatie européenne : Kaja Kallas doit succéder à l’espagnol Josep Borrell pour devenir la Haute représentante de l’Union européenne. Agée de 47 ans, l’ancienne avocate dirige l’Estonie depuis 2021 mais elle s’est fait connaitre sur la scène internationale à partir de février 2022, avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Dans les semaines qui suivent le déclenchement du conflit, Kaja Kallas acquiert une stature et une renommée qui vont bien au-delà de la place démographique et économique de l’Estonie. En consacrant 30 % du budget de la défense de son pays à l’aide militaire à l’Ukraine – aucun pays européen n’en fait autant, et en défendant à chaque occasion une ligne très claire : il faut soutenir l’Ukraine coûte que coûte et ne rien céder à la Russie. « Elle s'est montrée très courageuse en mettant l'accent sur les choses importantes », pointe Margaret Seselgyte, directrice de l’Institut de relations internationales de l’Université de Vilnius. « Elle a parlé de l'aide à l'Ukraine mais aussi du gel des avoirs russes malgré l'absence de consensus à ce sujet. Elle a donc fait preuve de créativité et d'une position très ferme en ce qui concerne la guerre en Ukraine. »À lire aussiL'Estonienne Kaja Kallas, résolument anti-Poutine, à la tête de la diplomatie européenneUne position très ferme qui s’explique par la situation géographique de l’Estonie, coincée entre la mer Baltique et la Russie, mais aussi par l’histoire familiale de Kaja Kallas. Aujourd’hui âgée de 47 ans, la dirigeante estonienne est née sous l’URSS mais n’a que des souvenirs d’enfance de cette époque. En revanche, son arrière-grand-père a participé à la première indépendance du pays en 1920. Et, après la Seconde guerre mondiale, plusieurs membres de sa famille sont déportés par le pouvoir soviétique – ce que Kaja Kallas ne cesse de rappeler lorsqu’elle parle de « l’occupation russe » de son pays. « Ma mère, déportée en Sibérie alors qu’elle était bébé, a souffert des crimes de guerre que la Russie a infligés à beaucoup trop de gens. En théorie, on parlait de paix, mais il s’agissait d’une paix selon les termes russes, c’est-à-dire des atrocités de masse, des répressions, de la colonisation. »Dans les pas de son pèreSa mère et sa grand-mère vont revenir de déportation au bout de dix ans. Et sa famille va de nouveau marquer l’histoire politique de l’Estonie : son père devient Premier ministre après la fin de l’URSS, puis commissaire européen durant une dizaine d’années. Kaja Kallas fait d’abord une carrière d’avocate, mais marche vite dans les pas de son père en devenant députée européenne pour le Parti de la Réforme, le parti libéral fondé par Siim Kallas en 1994. Elle devient Première ministre en 2021 et se fait donc très vite remarquer à l’international pour sa pugnacité…Paradoxalement, tandis que sa renommée ne cesse de croître sur la scène européenne, son étoile commence à pâlir en Estonie. Notamment en raison de difficultés économiques mais aussi d’un scandale retentissant lié à son mari. « Son mari avait des relations d’affaires avec la Russie, ce qui a suscité une controverse très grave, rappelle Margaret Seselgyte de l’Université de Vilnius. « D’un côté elle critiquait tous ces pays qui refusaient de sanctionner Moscou, et de l’autre elle n’était pas totalement transparente sur les affaires de son mari. Elle a prétendu qu’elle n’était pas au courant mais cela n’a pas suffi et il y a eu un très grand scandale politique en Estonie mais aussi dans toute la région balte car ici les gens sont très sensibles à tout ce qui touche à la Russie. »Une victoire pour les pays de l’EstMais ces difficultés n’entament en rien son crédit sur la scène européenne – et son nom s’impose tout naturellement pour succéder à Josep Borrel. Kaja Kallas convoite un temps le poste de secrétaire général de l'Otan, mais renonce pour laisser la place au Néerlandais Mark Rutte, et se concentre alors sur le poste de Haut représentant de l'UE. À son expérience diplomatique et politique, à son incontestable expertise sur le dossier ukrainien, s’ajoutent des qualités personnelles : Kaja Kallas parle non seulement le russe et l’estonien, mais elle est à l’aise également en français et en anglais. Seule interrogation : sera-t-elle capable de s’occuper d’autres dossiers que celui de l’Ukraine ? « La politique étrangère de l'Union européenne va au-delà de l'Ukraine et des sanctions contre la Russie », relève Nicole Gnesotto, vice-présidente de l’Institut Jacques Delors. « Et donc, effectivement, certains peuvent se demander si, vis à vis de la Méditerranée, du Maghreb, ou des crises en Afrique, elle aura autant de dynamisme pour ...
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  • Royaume-Uni: Keir Starmer, l’artisan du recentrage travailliste aux portes du pouvoir
    Jun 29 2024
    Il dirige le Labour depuis 2020 et a choisi de recentrer le programme et le discours du Parti travailliste britannique. Stratégie payante pour Keir Starmer qui devrait, sauf coup de théâtre, remporter les élections anticipées organisées au Royaume-Uni, le 4 juillet prochain. Tous les instituts de sondages lui accordent une très large avance face aux conservateurs de Rishi Sunak, pour lesquels ces élections anticipées s’annoncent désastreuses. Une avance que Keir Starmer essaie à tout prix de conserver en restant d’une très grande prudence durant les derniers jours de campagne.C’est la stratégie que la presse britannique décrit comme celle du « vase Ming » : porter un vase précieux sur un parquet ciré en essayant d’éviter tout faux pas... Avec ses cheveux poivre et sel, sa coiffure sage et son air quelque peu coincé, Keir Starmer est l’homme idéal pour jouer ce rôle de candidat sérieux bien qu’un peu falot. Peu charismatique, travailleur, et pas vraiment du genre à plaisanter, il est l’antithèse de Boris Johnson, l’ancien Premier ministre conservateur.Cet ancien avocat de 61 ans, fan de football et père de deux enfants, est issu d’un milieu modeste, ce qui a forgé en partie son caractère et ses convictions. « Son père était un ouvrier qualifié, un homme très compétent, mais dans son village du Surrey, une région plutôt chic, je pense que les gens [le] méprisaient », raconte le journaliste britannique Tom Baldwin, auteur de Keir Starmer : the biography (non traduit). « Il travaillait dans une usine, et cette sorte de snobisme est quelque chose dont Keir Starmer a souffert, et qu’il porte encore aujourd'hui. Il est donc le premier dirigeant travailliste depuis très longtemps à parler de classe sociale et de mépris social. Il en fait une question de respect pour les travailleurs ordinaires et cela constitue une grande partie de son langage aujourd'hui. »Après des études brillantes, Keir Starmer choisit de devenir avocat et se spécialise dans la défense des droits de l’homme, avant de devenir procureur général d’Angleterre et du Pays de Galles à la fin des années 2010.En 2015, il se lance en politique et devient député pour le parti travailliste. Quatre ans plus tard, le Labour de Jeremy Corbin est sèchement battu dans les urnes : Keir Starmer prend la tête du parti et replace au centre de l’échiquier une formation qui semblait alors incapable de revenir aux affaires. « Il a d'abord écarté un certain nombre de proches de Jeremy Corbyn qui étaient encore dans les instances du parti, rappelle Pauline Schnapper, professeure à la Sorbonne Nouvelle et spécialiste du Royaume-Uni. Il a donc exclu Corbyn lui-même, et a recentré les éléments de politique qui étaient les plus impopulaires chez lui, notamment tous les sujets de politique étrangère sur lesquels Corbyn était clairement en dehors du consensus britannique général, que ce soit sur la Russie, sur les États-Unis, sur l'Ukraine. »« Purge » chez les travaillistes« Une purge » au sein du Parti travailliste qui permet également à Keir Starmer de lutter contre les accusations d’antisémitisme formulées à l’époque contre le Labour.Le nouveau dirigeant travailliste complète ce recentrage par un volet économique, en renonçant notamment au programme de nationalisations défendu par Jeremy Corbyn. À l’image du New Labour de Tony Blair dans les années 1990, le Parti travailliste façonné par Keir Starmer se veut « business friendly » et donc proche des entrepreneurs. « C'est un programme prudent pour deux principales raisons, décrypte Pauline Schnapper. Il y a une raison électorale qui consiste à ne pas faire peur aux électeurs et notamment à ceux qui avaient voté conservateur. Et comme c'est une tactique qui pour l'instant semble très bien marcher, il n'y a pas de raison de la modifier. Il y a aussi que la situation économique actuelle est tellement mauvaise que les travaillistes font attention de ne pas faire miroiter des dépenses inconsidérées. Les caisses sont vides et c'est la raison pour laquelle Keir Starmer insiste sur la nécessité de faire tout ce qu'il faut pour que la croissance reparte et que, du coup, les rentrées fiscales soient plus importantes. »À l’approche des élections, Keir Starmer profite d'un contexte politique très favorable avec l'effondrement du Parti conservateur. Mais, aux yeux du journaliste Tom Baldwin, il a eu aussi le mérite de définir une stratégie et de s'y tenir. « Ce n’est pas une mince affaire de garder le cap sans se prendre les pieds dans le tapis, et c’est difficile d’être perçu comme quelqu’un de solide ! Ce n’est peut-être pas spectaculaire, mais c’est une vertu sous-estimée en politique. » Keir Starmer l’a répété durant la campagne : il est candidat pour être Premier ministre et « pas directeur de cirque ». Message adressé ...
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  • Rishi Sunak, le «fossoyeur» des Tories
    Jun 22 2024
    Il pourrait être celui qui va tourner la page de 14 ans d’hégémonie des conservateurs au Royaume-Uni. Le Premier ministre britannique a fait un pari très risqué en appelant à des élections le 4 juillet prochain. Rishi Sunak joue gros ! Les sondages donnent la gauche largement en tête. Alors pourquoi mettre son mandat en jeu maintenant alors que l’opinion est contre lui ? « Peut-être que Rishi Sunak a vu une fenêtre de tir avec de bonnes nouvelles économiques et le début des déportations de migrants au Rwanda », estime Simon Usherwood, professeur en politique et relations internationales à The Open University près de Londres. « Et tout cela l’a poussé, je pense à tenter sa chance même si la situation paraît désespérée. » Une campagne calamiteuseRishi Sunak comptait sur son bilan pour une opération éclair. « Je peux comprendre que les gens soient frustrés… », assurait le Premier ministre dans une interview, il y a quelques semaines. « Bien sûr qu’on n’a pas tout bien fait. Aucun gouvernement ne l’a fait et je sais que ça reste difficile pour beaucoup de personnes. Je suis à ce poste depuis 18 mois et je pense que particulièrement sur le terrain économique, les gens peuvent constater que l’inflation est revenue à la normale, que l’économie se porte bien et que les salaires augmentent. C’est pour ça que nous avons des élections maintenant. » C’est raté. Sa campagne est un vrai chemin de croix. Des sondages calamiteux, la concurrence directe du candidat anti-immigration Nigel Farage, sans compter sa grosse bourde lors des commémorations du débarquement en France. Rishi Sunak a quitté les cérémonies avant la fin.Désamour avec la population Les enquêtes d’opinion sont cruelles : pour deux tiers des Britanniques, Rishi Sunak est un mauvais Premier ministre. À son arrivée à Downing Street, certains espéraient pourtant qu’il apporterait un vent nouveau chez les Tories : fils d’immigrés indiens devenus millionnaires, hindoue, ancien étudiant à Stanford aux États-Unis avant d’être banquier. Aurélien Antoine, professeur des universités, voit plusieurs explications à ce désamour : « Rishi Sunak paie déjà les conséquences des politiques passées qui n’ont pas donné de résultats. C’est celles de Boris Johnson ou encore le fiasco du passage éclair au 10, Downing Street de Liz Truss », développe le directeur de l’Observatoire du Brexit. « Lui-même a fait un certain nombre d’erreurs majeures. Tout dernièrement, par exemple, l’idée du retour de la conscription pour les jeunes à partir de 18 ans a été très mal vécue. Ou encore cette image de millionnaire. Du plus mauvais effet dans un Royaume-Uni qui souffre. » L’objectif aujourd’hui pour les Tories, ce n’est plus de gagner les élections, mais de limiter la casse.Quel avenir pour Rishi Sunak ?Au lendemain de la débâcle annoncée du 4 juillet, certaines mauvaises langues laissent entendre qu’il pourrait s’exiler en Californie. Rishi Sunak y a travaillé, il a une Carte verte et une belle maison à plus de 7 millions de dollars à Santa Monica. Mais à 44 ans, le conservateur assure qu’il veut rester au Parlement. Encore faut-il qu’il conserve son siège. « Il n’est pas garanti qu’il se maintienne dans sa circonscription du Yorkshire », prévient le chercheur Aurélien Antoine. « Au Royaume-Uni, depuis quelques décennies, on n’aime pas trop les "losers", on les voit plus trop réapparaître. Ce sera évidemment très compliqué, donc on le verra sans doute être intéressé par des emplois privés ou de conseils, comme ce fut le cas par exemple pour Tony Blair. Il se fera sans doute discret dans les prochaines années. »Succession chez les ToriesLes candidats pour reprendre la tête des Tories sont sortis du bois, l’ex-Première ministre Liz Truss ou bien encore la très droitière Suella Braverman. La succession a commencé. Le virage à droite toute du parti aussi. « Quel que soit celui ou celle qui va diriger le parti, une chose est claire : c’est que l’aile modérée des conservateurs va perdre du terrain », analyse Simon Usherwood. « Et donc ce sont les plus libéraux, ceux qui sont le plus à droite, qui vont donner le ton et devenir les futurs candidats ». Après 14 ans à la barre, les Tories sont rattrapés par l’usure du pouvoir et menacés par une concurrence toujours plus à droite.
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  • Herbert Kickl (Autriche): le chancelier du peuple ?
    Jun 15 2024
    Dimanche 9 juin, le FPÖ, le parti de la liberté d’Autriche qui est aussi appelé le Parti libéral autrichien, s’est imposé lors des élections européennes avec vingt-cinq pourcents des voix. Un résultat un peu en deçà des projections faites avant le scrutin, mais qui démontre que ce parti qui a gouverné plusieurs fois en coalition est de retour après des années de crise suite notamment au scandale de l’Ibizagate. Un retour au premier plan qui est en grande partie le fruit du travail mené depuis 2021 et même avant par Herbert Kickl, le patron de cette formation. Une figure politique du pays, très radical dans ses positions, et qui a déjà occupé un poste ministériel de 2017 à 2019. Il n’a pas un parcours typique, pas de diplômes, mais il s’est très vite engagé en politique. Herbert Kickl, aujourd’hui âgé de cinquante-cinq ans, a fait ses classes dans l’académie du FPÖ entre 1995 et 2001 avant d’en être nommé directeur adjoint, puis directeur jusqu’en 2006. L’occasion pour lui de devenir un personnage incontournable, notamment la plume de Jörg Haider, l’ancien patron du FPÖ, puis le secrétaire général du parti jusqu’en 2018. Entre temps, Herbert Kickl a été ministre de l’Intérieur dans le dernier gouvernement de coalition entre le FPÖ et le Parti populaire autrichien avant qu’éclate le scandale de l’Ibizagate en 2019.Un scandale que résume Jérôme Segal, essayiste et historien franco-autrichien, maître de conférences à Sorbonne Université, également chercheur et journaliste à Vienne : « L’Ibizagate en deux phrases, c'est un enregistrement qui est paru en 2019, montrant qu'en 2017, à Ibiza, les deux principaux représentants du FPÖ se montraient prêts à vendre le pays à un oligarque russe en échange de contrats de chantier public, etc, en faveur de à la Russie. »À lire aussiÉlections européennes: en Autriche, le parti d’extrême droite FPÖ donné favoriL’Ibizagate, un tournant pour Herbert KicklLa publication de ses enregistrements va avoir l’effet d’une bombe, provoquant des élections anticipées et mettant fin brutalement à la carrière d’Heinz-Christian Strache qui dirigeait jusqu’alors le FPÖ et qui était au moment des faits vice-chancelier d’Autriche. C’est alors qu’Herbert Kickl va définitivement mettre la main sur cette formation d’extrême-droite, détaille Jérôme Segal : « Herbert Kickl, lorsqu'il prend les rênes du parti de manière officielle en 2021 (même s’il en était déjà la figure montante), juste après l'Ibizagate, décide de faire porter la faute de ce scandale à Strache. Une manière de dire que lui n’était pas du tout au courant et qu'il n’est pas du tout dans cet esprit-là. Et c'est comme ça que petit à petit, il a pu gagner la confiance de nombreux Autrichiens. »Après ce tournant, Herbert Kickl va choisir une tactique assez unique en son genre, comme l’explique Patrick Moreau, docteur en histoire et docteur d’État en sciences politiques, chercheur au CNRS et spécialiste de l’extrême-droite autrichienne : « Je dirai qu’il y a une méthodologie. Il faut prendre comme contre-exemple Marine Le Pen et sa pratique politique qui consiste à dédiaboliser le parti. Herbert Kickl lui a fait la réflexion résolument inverse. Il est partisan de la provocation permanente. Il considère que c'est le seul moyen, dans une société de consensus comme l'est la société autrichienne, de mobiliser tous les éléments protestataires, tous les éléments antisystèmes. C'est quelqu'un qui, avec une plume extrêmement acérée, avec des discours très violents, mobilise les masses. Et ce discours passe très bien dans une partie de la société autrichienne. »Le FPÖ, la droite de l’extrême-droite européenneProvocateur, raciste, islamophobe, anti-immigration, pro-russe et partisan d’une sortie de l’Union européenne, Herbert Kickl est considéré comme la droite de l’extrême-droite étant donné la radicalité de ses positions. Un discours qui séduit et qui a permis à son parti de s’imposer aux élections européennes avant des législatives qui se profilent en septembre prochain.Un retour aux affaires de ce parti représenterait-il une menace pour la démocratie ? Pour Jérôme Segal, il existe encore des garde-fous : « Personnellement, je pense que la menace est réelle parce qu'on sait qu'ils ont des appuis très forts au ministère de l'Intérieur, dans les services de renseignement. Donc l'Autriche pourrait éventuellement pâtir d'une arrivée au pouvoir de l'extrême droite. En même temps, l'extrême droite serait forcément alliée, comme elle l'a été récemment entre 2000 à 2006, et à nouveau entre 2017 et 2019. Mais c’est délicat de savoir dans quelle mesure les conservateurs laisseraient les coudées franches à l'extrême droite. Actuellement, je pense que le pays est moins en danger qu'il ne l'a été, ...
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  • Le Parlement européen, puissance montante de l’Union européenne
    Jun 8 2024
    Les élections européennes, qui s’achèvent ce dimanche 9 juin, sont hors normes avec quelque 370 millions d’électeurs pour un vote qui se décline dans 27 pays différents. Et c’est à l’issue de ce scrutin que se dessineront les nouveaux rapports de force au sein de l’hémicycle. Paradoxalement, la seule institution européenne élue directement par ses citoyens est aussi la moins bien connue de l’UE. Elle joue pourtant un rôle de plus en plus important depuis la révision des Traités européens. Beaucoup d’électeurs pensent que le Parlement européen joue encore aujourd’hui un rôle essentiellement symbolique – et le caractère très national des élections européennes n’aide certainement pas à lutter contre ce préjugé.Ce fut certes le cas à l’époque où le Parlement n’était pas élu directement, et même après les premières élections directes qui furent instaurées en 1979. Mais, depuis le Traité d’Amsterdam de 1997, et surtout depuis le Traité de Lisbonne entré en vigueur en 2009, les eurodéputés jouent un véritable rôle de législateurs. « Les lois européennes doivent toujours être adoptées par deux institutions : le Parlement qui représente les citoyens, et le Conseil qui représente les États membres », explique Jaume Duch, porte-parole du Parlement européen. « La Commission est en charge de présenter les propositions, mais c'est le Parlement et le Conseil qui doivent se mettre d'accord pour adopter les lois européennes. Donc, la plupart des lois qui nous affectent tous en tant que citoyen européen sont des lois qui passent par le Parlement européen, qui doivent être adoptées, modifiées, adoptées par ce Parlement européen. »À ce rôle de législateur s’ajoutent deux fonctions majeures : le contrôle du budget européen et l’investiture de la Commission européenne. Les 720 Européens qui seront désignés ce 9 juin devront approuver la nomination de chaque commissaire, et bien sûr celle du président ou de la présidente de la Commission. « Selon les traités, c'est le Conseil européen et donc les dirigeants des 27 États membres qui vont faire la proposition officielle pour le prochain président de la Commission », rappelle Jaume Duch.« Mais après, c'est le Parlement qui vote, c'est le Parlement qui élit. Et d'ailleurs, les traités prévoient logiquement qu’en cas de refus, le Conseil européen aura un délai d'un mois pour présenter une autre candidature. Donc, la personne qui voudra présider la Commission doit d'abord se faire nommer par les dirigeants européens… Mais après, elle doit obtenir une majorité absolue, plus de 361 voix au sein du Parlement européen. »À lire aussiLe Parlement européen adopte une législation inédite sur la liberté des médiasL’enjeu crucial du 9 juin Ursula von der Leyen, l’actuelle présidente de la Commission qui souhaite être reconduite pour un deuxième mandat, va devoir rassembler une majorité sur son nom… et c’est donc l’un des enjeux majeurs de cette élection. En 2019, l’ancienne ministre allemande de la Défense a été investie avec seulement 9 voix d’avance, et à l’issue de ces nouvelles élections il va lui falloir de nouveau batailler pour obtenir une majorité, ce qui n’a rien de garanti. « Même si le Parti populaire européen qui fédère les partis de droite arrive vainqueur, comme les sondages le prévoient, il devra bien composer comme il l'a fait par le passé avec les sociaux-démocrates qui devraient être le deuxième groupe le plus important à l'issue des élections », décrypte Sébastien Maillard, conseiller spécial de l’Institut Jacques Delors. « Et tout l'enjeu est de savoir quel sera le troisième groupe : les centristes libéraux emmenés par la majorité macroniste en France ? Ou bien, s'ils font un piètre score, le groupe des Conservateurs et Réformateurs qui sera dominé par Giorgia Meloni ? »À lire aussiUrsula von der Leyen, tête de liste du PPE pour les élections européennesPour l’heure, la dirigeante italienne a pris soin de ne pas dévoiler ses intentions pour l’après-10 juin. Mais deux possibilités s’offrent à la patronne du parti Fratelli d’Italia, qui devrait sortir en position de force de ces élections, et voir son nombre d’eurodéputés passer de 10 à une bonne vingtaine. Deux scénarios s’offrent à la Giorgia Meloni : accepter une alliance au coup par coup avec la droite conservatrice et avec Ursula von der Leyen, ou bien répondre à l’appel lancé par Marine le Pen, pour une alliance des extrêmes-droites à Strasbourg.Divergences au sein de l’extrême-droite« Ce deuxième scénario ne paraît pas crédible pour deux raisons », estime pour sa part Sébastien Maillard, « car il y a des divergences idéologiques et tactiques entre les différentes composantes de l’extrême-droite européenne. La guerre en Ukraine les a vraiment divisées ...
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  • Walter Baier, un «Spitzenkandidat» communiste bien seul à la tête de la gauche radicale
    Jun 1 2024
    Dans le sillage des élections européennes du 9 juin, il y aura aussi les postes clés dans les institutions européennes à renouveler. Le plus important : la présidence de la Commission. Ursula von der Leyen est candidate à sa succession, mais elle n’est pas seule en lice. Parmi les prétendants issus de sept partis, les « Spitzenkandidaten » (ou têtes de liste), il y a le communiste Walter Baier du Parti de la gauche européenne (PGE). Fait étonnant, l’économiste âgé de 70 ans est un parfait inconnu en Europe. Walter Baier est un véritable ovni à Bruxelles, il n’a jamais été député européen ou joué un rôle dans les institutions européennes. Confronté à ce manque d’expérience, il a tenté d’en faire un atout, lors d’un débat avec ses concurrents :« L’Europe, ce n’est pas seulement Bruxelles. L’Europe, ce sont 27 pays et des millions de citoyens. La gauche européenne veut être la voix de ces citoyens, qui ne sont que rarement entendus à Bruxelles. »Pour en savoir plus sur ce candidat, il faut chercher du côté de l’Autriche, son pays natal, où on apprend qu’il est une figure bien connue du communisme autrichien. À partir des années 1970, Walter Baier gravit un par un les échelons du KPÖ, parti encore totalement aux ordres de Moscou. À cette époque, bien avant la chute du mur en 1989, Russes et Allemands de l’Est se servent d’ailleurs de leurs camarades autrichiens pour faire des affaires de l’autre côté du rideau de fer.Communisme autrichienWalter Baier incarne ce passé sulfureux :« C’est un fonctionnaire communiste depuis très longtemps, il vient d’une famille communiste. D’ailleurs, c’est l’incarnation de la vieille domination de l’URSS sur les partis communistes en Europe, estime le chercheur Patrick Moreau. Dans les documents que j’ai à ma disposition sur le financement du KPÖ, on voit que la Russie versait depuis fort longtemps 250 000 dollars chaque année au KPÖ. Naturellement, Walter Baier était au courant de ça. Il était à la fois l’homme du SED, le parti dominant en Allemagne de l’Est, et il était l’homme de Moscou. » De cette époque faste du parti communiste autrichien, des dizaines de millions d’euros restent d’ailleurs à ce jour introuvables.Cette proximité avec la Russie influence encore aujourd’hui les combats politiques de Walter Baier. Il suffit de prendre l’exemple la guerre en Ukraine. Walter Baier prône une « solution politique » et dit que « la fin des combats ne peut plus résulter du champ de bataille ». Bien qu’il se prononce en faveur de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine, Walter Baier reste flou sur le sort des régions occupées par la Russie. « Il suit en réalité la ligne du président russe Vladimir Poutine qui consiste à dire qu’il faut impérativement négocier la paix au plus vite, analyse Patrick Moreau. Ce qui impliquerait donc une partition de l’Ukraine, c’est-à-dire de facto : ce que la Russie a pris à l’Ukraine devrait revenir à la Russie. »À lire aussiSuivez les résultats des élections européennes 2024Rempart contre l’extrême droiteL’un des thèmes de campagne du candidat du PGE est la lutte contre l’extrême droite. Walter Baier se voit comme un rempart contre la montée du populisme et accuse Ursula von der Leyen de flirter avec l’extrême droite. L’actuelle présidente de la Commission n’a en effet pas fermé la porte à une éventuelle collaboration entre son groupe de centre droit, le Parti populaire européen (PPE) et le groupe ultranationaliste des Conservateurs et Réformistes européens (CRE).« Il ne peut y avoir le moindre compromis avec l’extrême droite, lance alors le candidat dans un débat entre les "Spitzenkandidaten" à l’adresse d’Ursula von der Leyen. J’étais choqué de vous entendre dire que la coopération avec eux dépendrait du résultat des élections. Pour moi, la question sociale est essentielle. Tant que nous n’offrons pas une vie digne, des logements abordables et des emplois stables aux gens, nous ne serons pas capables de vaincre l’extrême droite en Europe. »Pas l’unanimitéPeut-il marquer des points sur ce terrain de la lutte contre l’extrême droite ? « Il est crédible sur ce point, les partis communistes ont une tradition fortement antifasciste, dit Andreas Eisl, chercheur à l’institut Jacques Delors et Autrichien comme Walter Baier, mais c’est un sujet mis en avant aussi par d’autres partis européens, notamment les sociaux-démocrates. Pour proposer quelque chose de crédible, il faut de l’unité. C’est l’un des grands problèmes de la gauche radicale qui reste très fragmentée. »Walter Baier ne fait en effet pas l’unanimité au sein de sa famille politique. Si ses camarades français du PCF soutiennent sa candidature, ce n’est pas le cas de La France insoumise, ni des Espagnols de ...
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  • Anders Vistisen, le candidat danois qui rejette l’Europe
    May 25 2024
    Dans tout juste trois semaines se tiennent les élections européennes. Parmi les têtes d’affiche cette année, un certain Anders Vistisen, qui fait office de candidat pour la présidence de la Commission européenne, le fameux « Spitzenkandidat », pour le groupe Identité et démocratie (ID), qui regroupe plusieurs formations d’extrême droite au Parlement européen. Anders Vistisen est également la tête de liste du Parti populaire danois, une formation en perte de vitesse, à l’image du groupe ID. C’est le petit jeune des « Spizenkandidat » cette année, c’est-à-dire des candidats des groupes au Parlement européen qui briguent la présidence de la Commission. Mais Anders Vistisen n’en a cure, lui qui était déjà le plus jeune eurodéputé élu en 2014, lorsqu’il avait tout juste 26 ans. Eurosceptique, préconisant pendant des années le « Daxit », la sortie du Danemark de l’Union européenne, fortement islamophobe, il est le candidat désigné du groupe ID au Parlement européen, le groupe d’extrême droite Identité et démocratie qui regroupe les Allemands de l’AFD, les élus du Rassemblement national ou encore les Italiens de la Ligue du Nord, le parti de Matteo Salvini.Une tête de liste inconnue au niveau de l’Union européenne et pas seulement, détaille Rune Stubager, professeur en sciences politiques à l’Université d'Aarhus au Danemark : « Il n'est pas tellement plus connu au Danemark. Il a fait l'essentiel de sa carrière à Bruxelles en tant qu'eurodéputé et n’a donc pas été très présent sur la scène politique nationale. C'est la première fois qu'il se présente en tant que tête de liste de son parti au Danemark. Nous n'en savons donc pas beaucoup plus sur lui. Mais pour autant que je sache, il a en quelque sorte grandi au sein du Parti populaire danois, dans son organisation pour les jeunes. Il s'est ensuite présenté au Parlement européen, a été élu et maintenant, il est considéré comme le meilleur candidat pour être tête de liste aux élections européennes. »Un personnage peu charismatique, mais consensuelMais pourquoi le groupe ID a choisi Anders Vistisen pour occuper ce rôle, sachant que parmi les élus membres d’Identité et démocratie, des figures politiques plus connues auraient pu être désignées ? Pour Cyril Coulet, spécialiste des pays nordiques et ancien chercheur à l’Institut suédois de relations internationales, c’est justement parce qu’il n’est pas trop connu et trop clivant qu’ID l’a choisi : « C'est une personnalité somme toute assez consensuelle par rapport aux idées défendues par ces formations politiques qui, par ailleurs, vient d'une petite formation qui ne peut pas prétendre à une quelconque hégémonie d'un point de vue idéologique sur le contenu de la position du groupe Identité et démocratie. Et donc c'est un choix de réseau avec une personnalité qu'on peut qualifier d'a priori peu charismatique. »Sa formation en perte de vitesseAnders Vistisen profite de cette position pour se faire connaître et entendre, car même s’il est le « Spitzenkandidat » de son groupe, il n’est pas pour autant assuré d’être à nouveau élu député européen, sa formation des Démocrates danois étant en perte de vitesse ces dernières années. Une situation surprenante pour un parti qui avait obtenu plus de 26% des voix en 2014, mais logique étant donné les problèmes accumulés ces dernières années, détaille Rune Stubager : « Le parti a connu des hauts et des bas. Il a obtenu un très bon résultat aux élections législatives de 2015, mais a ensuite décidé de ne pas rejoindre le gouvernement qui a été formé. Ce qui semble avoir déçu un grand nombre de ses électeurs, parce qu'ils avaient l'impression d'avoir la possibilité d'accéder au pouvoir, ce que n’a pas fait le parti. Cette formation est alors entrée dans une période de conflit interne. Dans ce même laps de temps, nous avons assisté à la création de deux nouveaux partis qui se disputent le même type d'électeurs : la Nouvelle droite et les Démocrates danois. On peut donc dire qu’ils souffrent à la fois de problèmes internes et d’une concurrence externe. »Quid de l’avenir d’Anders Vistien ?En perte de vitesse sur la scène nationale, ce parti pourrait bien ne plus être représenté au Parlement européen après le scrutin du mois de juin. Une situation qui n’inquiète pas Cyril Coulet qui estime qu’Anders Vistisen est à même de rebondir : « Il a fait toute sa carrière au Parlement européen, mais il a eu aussi des mandats locaux et c'est quelqu'un qui fait partie de l'appareil politique, mais vraiment du sommet de l'appareil politique du Parti populaire danois. Donc aujourd'hui, ce serait un revers, sans doute que ça porterait atteinte à son crédit à l'intérieur. Et d'autre part, il a été en position de pouvoir briguer, à un moment donné, la présidence...
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  • Nicola Procaccini, l'homme de confiance de Giorgia Meloni à Bruxelles
    May 17 2024

    C’est l’un des principaux visages de l’extrême droite au Parlement de Bruxelles et de Strasbourg : Nicola Procaccini est notre Européen de la semaine sur RFI. À trois semaines des élections européennes, suite de notre tour d’horizon des personnalités qui comptent dans ce scrutin. L’eurodéputé italien est le vice-président du groupe des Conservateurs et réformistes européens. C’est aussi l’homme de confiance de Giorgia Meloni à Bruxelles.

    Nicola Procaccini est un proche parmi les proches de la cheffe du gouvernement italien. Ils se connaissent depuis leurs études quand ils étaient étudiants à la faculté à Rome. Ils militent ensemble au sein de l’organisation de jeunesse de l’Alliance nationale. Nicola Procaccini a ensuite suivi de près Giorgia Meloni dans son ascension politique. Il a par exemple été son porte-parole quand elle était la ministre de la Jeunesse de Silvio Berlusconi. Et son fauteuil au Parlement européen, il le doit à son amie : en 2019, Giorgia Meloni renonce à son siège, le voilà député européen. « Ils se connaissent depuis toujours, depuis qu’ils étaient gamins », raconte Giuseppe Bettoni, professeur de géographie politique à l’université Tor Vergata de Rome.« Georgia Meloni, encore aujourd’hui, vit sur la base d’un groupe très restreint d’amis. En dehors de ce cercle, il y a Nicola Proccacini, un autre homme de confiance pour elle. Et c’est sur lui sans doute que va reposer la confiance de tout le groupe de Frattelli d’Italia une fois que Georgia Meloni aura renoncé à sa charge, bien sûr. »

    Droite radicale

    À 48 ans, Nicola Procaccini est quelqu’un de pragmatique, notamment sur les questions migratoires. Efficace et très présent, il a été classé 10e député européen le plus influent dans le Top 40 établi par Politico l’an dernier. Mais à côté de ça, pas de doute, il est d’une droite radicale. Lors d’un débat sur le fascisme en Europe, il a par exemple défendu les fascistes qui ont manifesté le 7 janvier à Rome : « L’objectif ici est de salir l’Italie et de diffamer les jeunes. Premièrement, ce n’était pas un défilé, mais une simple commémoration. Une commémoration qui existe depuis 40 ans et qui se tient chaque année. Alors oui, certains militants font le salut fasciste, mais ils sont de moins en moins nombreux… »

    L’objectif de Nicola Procaccini, numéro 2 sur la liste menée par Giorgia Meloni, est de reproduire au niveau européen ce qu’a fait son parti Fratelli d’Italie en Italie : unir les droites conservatrices. Et les Européennes s’annoncent bien pour les droites radicales selon les sondages. Le groupe ECR pourrait devenir la troisième force au Parlement européen. Avec un rêve : être une sorte de faiseur de rois entre la droite du PPE et la gauche.

    Giorgia Meloni, la tête d’affiche

    ECR n’a pas voulu avoir de « spitzenkandidate », une tête d’affiche au niveau européen. En réalité, c’est bien Giorgia Meloni qui joue ce rôle. Son parti domine numériquement le groupe ECR. Et c’est indéniablement la plus connue des candidats. Elle est tête de liste en Italie, mais sans réelle intention de quitter Rome pour Bruxelles. Qu’importe, c’est bien elle qui négocie avec Ursula von der Leyen. En plus, selon l’universitaire Giuseppe Bettoni, les deux femmes s’entendent bien : « Il y a un très bon rapport avec Ursula von der Leyen et Giorgia Meloni, mais est-ce qu'Ursula von der Leyen va être le cheval sur lequel elle va tout tenter une fois qu’elle arrive, éventuellement si elle y arrive, à faire d’ECR la troisième force du Parlement européen qui peut décider qui va être le roi ? C’est clair qu’ils font des calculs déjà, comme s’il s’agit d’une puissance à niveau politique et européen. »

    La présidente de la Commission européenne, candidate à sa succession, s’est déclarée prête à collaborer avec les élus ECR. Ces élections vont quoiqu’il arrive confirmer l’ascension des populistes européens et leur place de plus en plus incontournable à Bruxelles et Strasbourg.

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