• Inondations en Inde: la corruption pointée du doigt dans la défaillance des infrastructures
    Jul 5 2024

    C'est la consternation en Inde où de nombreuses infrastructures se sont effondrées dans le nord du pays, en proie à de violentes pluies et des inondations. Certaines avaient été inaugurées il y a peu, si bien que le doute plane sur le respect des normes de sécurité sur ces chantiers financés à grand renfort d’argent public.

    de notre correspondant à Bangalore,

    Chaque jour, ou presque, apporte son lot de mauvaise nouvelle. D'abord à New Delhi qui, après une canicule inhumaine en mai et juin, est maintenant aux prises avec des inondations dévastatrices qui paralysent le trafic, dévastent les rez-de-chaussée et ont fait plus de dix morts.

    L’entrée du Terminal 1 de l’aéroport international de la capitale s’est effondrée, tuant un chauffeur de taxi et blessant de nombreuses personnes. Un tunnel ouvert dans le centre, en 2022, pour 86 millions d’euros, est noyé sous l’eau. Dans l’État du Bihar, en 15 jours, ce sont huit ponts qui sont à terre, certains encore en construction, là encore avec de l’argent public. D’autres ponts se sont brisés dans le Jharkhand et à Manipur. La canopée de deux autres aéroports, dans les États du Gujarat et du Madhya Pradesh, s'est effondrée. La liste n’est pas exhaustive, mais citons aussi Ayodhya, ville sainte de l’Uttar Pradesh où le Premier ministre Narendra Modi fait construire un temple hindou géant. Les prêtres se plaignent de fuites dans le toit, pendant que les habitants constatent que les avenues fraichement construites sont déjà pleines de nids de poules…

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    La corruption pointée du doigt

    Il ne suffit que dire que la pluie est fautive... car si les pluies sont l’élément déclencheur, elles ont lieu chaque année, donc les infrastructures sont censées y résister ! Face à une telle série de défaillances, c’est la corruption qui est pointée du doigt. Le secteur de la construction en Inde est connu pour donner lieu à d'importants détournements de fonds publics, avec des chantiers facturés trop chers, dont la construction est ensuite bâclée au plus bas prix, au mépris de toutes les normes comme l’évacuation d’eau.

    C’est donc le gouvernement central ou les gouvernements locaux qui ont financé ces projets, accusés par l’opposition d’avoir mis en danger le pays. Le gouvernement promet des enquêtes, des réparations et certains partisans du Premier ministre soulignent que ces catastrophes arrivaient de tout temps. C’est vrai, mais pas dans une telle proportion. Surtout, Narendra Modi peut difficilement se plaindre d'être critiqué par le Parlement. C’est lui-même qui s’est mis en scène à la télévision lors de l’inauguration de certains de ces grands chantiers, les transformant en campagne politique avec sa photo affichée partout. Le symbole le plus criant est celui d’Ayodhya, dont les différents chantiers ont coûté plus de 10 milliards d’euros et dont le temple devait servir à galvaniser les électeurs hindous. Il aura suffi d’une mousson pour balayer les routes, mais aussi discréditer le récit politique orchestré par son parti, le BJP, autour de cette ville.

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  • Indonésie : jeux d'argent en ligne, la guerre est déclarée
    Jul 4 2024

    En Indonésie, la prolifération des jeux d’argent en ligne a poussé les autorités à déclarer la guerre à ce « nouvel opium des masses ». Alors que les jeux d’argent sont strictement interdits dans l’archipel et passibles de peines de prison, les paris en ligne explosent surtout depuis les confinements et la pandémie de Covid. Le phénomène tentaculaire touche désormais 4 millions d’Indonésiens, dont 2,7 millions sont accros aux jeux. Et selon les rapports, tous les âges et toutes les catégories sociales sont concernées.

    Les autorités admettent qu’elles font face à une véritable épidémie. La démocratisation des téléphones portables tout comme l’accès toujours plus important aux nouvelles technologies y sont pour quelque chose.

    Sans compter les publicités attractives et ciblées, selon les âges, qui utilisent des algorithmes pour faire remporter aux nouveaux utilisateurs des paris avant de les entraîner dans une spirale d’endettement. Des rapports ont démontré que les 38 provinces indonésiennes étaient touchées, certaines plus que d’autres, mais que personne n’était épargné. Les profils des joueurs sont aussi bien des policiers ou des militaires, que des députés : 82 au total ont été épinglés dans une enquête du centre d’analyse sur les transactions financières. L’agence de lutte contre le blanchiment d’argent a ainsi détecté 63.000 transactions suspectes impliquant des fonctionnaires.

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    Faits divers tragiques en lien aux jeux d’argent en ligne

    Plusieurs cas de suicides très médiatisés ont été au cœur de l’actualité ces derniers mois, notamment dans les rangs de la police et de l’armée et supposément liés à des jeux d’argent en ligne. Ainsi, un militaire accro aux jeux et surendetté a mis fin à ses jours fin mai. Autre tragédie, une policière a immolé par le feu son mari qui avait dilapidé toutes leurs économies en pariant en ligne. Ou encore un lieutenant d’infanterie a reconnu avoir vidé les caisses de son unité pour assouvir sa passion du jeu.

    Mais l’inquiétude des autorités concerne l’ampleur de l’addiction aux jeux chez les plus jeunes, parfois même chez des enfants de moins de 10 ans. Le personnel soignant d’une clinique dans le sud de Jakarta n’avait jamais vu ça ; une cinquantaine de gamins, âgés entre 9 et 11 ans pour la plupart et issus de familles de la classe moyenne supérieure, faisaient partie des patients. Des enfants décrivent un état de stress permanent et au bord de l’explosion.

    Les femmes au foyer comptent également parmi les victimes, dont certaines sombrent dans la prostitution pour éponger leurs dettes.

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    Une tâche titanesque pour l’administration de Joko Widodo

    Pour enrayer le phénomène, le gouvernement indonésien supprime des centaines de milliers de ces sites par an, mais la méthode a ses limites étant donné que de nouveaux sites réapparaissent au rythme de 10.000 par jour.

    La difficulté réside aussi dans le fait que les sites de jeux d’argent en ligne sont transnationaux. Les mafias contrôlant ces plateformes exercent pour la plupart depuis la région du Mékong, depuis la Chine, la Birmanie, le Laos et le Cambodge, ce qui nécessite une action commune des États.

    Enfin, les enjeux financiers sont énormes. Les montants des transactions atteignent selon une étude 12.000 milliards d’euros.

    Le traçage des sites, le blocage des comptes bancaires et enfin la sensibilisation des parents et des différents acteurs de la société civile ou religieuse font partie de l’arsenal déployé pour venir à bout du problème.

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  • Chine: colère paysanne face à la chute du prix du blé
    Jul 3 2024
    À la Une en Asie ce mercredi 3 juillet, la colère paysanne en Chine face à la baisse des prix des céréales. Les revenus des agriculteurs sont très affectés, notamment dans les régions du nord et de l’est marquées par la sécheresse. De notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde avec Chi Xiangyuan Un long râteau de bois accroché à l’arrière d’un triporteur électrique tamise le blé étalé sur une bande de béton. L’opération est répétée autant de fois que nécessaire, partout où cela est possible : sur le terrain de basket près de la mairie, sur les routes menant aux fermes. La précieuse récolte doit sécher avant d’être vendue aux intermédiaires.Baisse du prix du blé et hausse des coûts de productionSauf que cette année, le blé ne « vaut » plus un radis, nous dit ce paysan que nous ne nommerons pas, comme l’ensemble des personnes rencontrées pendant ce reportage. « On ne gagne quasiment rien, tout au plus quelques centaines de yuans. Les gens sont très mécontents. Vous cultivez la terre, mais les prix sont tellement bas qu’on ne peut rien faire de notre travail. C’est tout juste si on peut vendre notre récolte ! Malheureusement on n’a que ça pour vivre ! »Après sept mois de dur labeur, ces paysans du Hebei - la province qui entoure la capitale chinoise - ont vu le prix du blé tomber à 1,18 yuans - 15 centimes d’euros - le kilo. Une double peine alors que le nord du pays a subi plusieurs semaines de sécheresse en juin. Chapeau conique vissé sur la tête pour se protéger des lames brûlantes du soleil de midi, cet agriculteur affirme que tout le reste a augmenté. « On doit louer les machines, c’est à peu près 100 yuans - 13 euros - pour récolter un acre de blé ; 40 à 50 yuans pour labourer, et 35 yuans par acre pour l’irrigation. Si bien qu’il ne nous reste plus rien à la fin. »Le 8 juin 2024, une vidéo est devenue virale sur les réseaux sociaux avant d’être censurée. Une agricultrice se plaignait d’avoir gagné moins de 200 euros pour plus de 7 hectares de blé récolté, alors que dans le système médical coopératif, l’assurance santé des paysans coûte 380 yuans - environ 50 euros - par an. Et d’interpeler les autorités qui depuis quelques années ont supprimé les subventions : « on n’a pas besoin de nouveaux lampadaires ou de nouvelles routes. Il faut d’abord résoudre le problème des prix, afin que les paysans n’aient plus à payer pour travailler. »La bouteille d’eau minérale plus chère que le kilo de bléCette plainte a été largement relayée, notamment dans les régions affectées par la sécheresse. Dans la province centrale du Henan le mois dernier, un agriculteur a ainsi déclaré dans un quotidien local qu’il devait faire la queue tous les jours, parfois dès deux heures du matin, pour pouvoir prendre de l’eau dans un réservoir réservé aux cultures. Les plaines du centre et le nord de la Chine manquent d’eau, alors que le sud et le bassin du Yangtze sont victimes d’inondations à répétition. L’eau est inégalement répartie dans ce pays continent. Heureusement, les réservoirs du Hebei semblent mieux pourvus, mais là aussi la sécheresse n’arrange rien à l’affaire... « On ne peut même pas récolter le maïs, car une partie est desséchée. Même si nous pompons l’eau de la rivière voisine en permanence pour arroser les champs, les sols sont tellement secs que l’irrigation se fait mal. Et bien sûr cette eau supplémentaire à un coût. »Dans les villages traversés, les lourdes portes en métal des propriétés agricoles ont du mal à retenir la colère. « Avec les prix actuels, la marge bénéficiaire est trop mince », se plaint un patron de ferme qui fait travailler des employés sur 28 hectares de terres agricoles. « Vous vous rendez compte, lance-t-il en accompagnant d’un geste de la main son dépit : la petite bouteille d’eau que venez de boire permet d’acheter plusieurs kilos de blé ! » Selon ce dernier, il y a là un manque de volonté politique : « La Chine se soucie-t-elle vraiment des agriculteurs aujourd’hui ? Dans le passé, les empereurs donnaient la priorité aux cultures, car si les gens ne mangent pas à leur faim, cela risque de provoquer le chaos. »Petites exploitations et surcapacitésDes difficultés à vivre de son travail, surtout quand il s’agit de petites exploitations et dans un contexte économique ralenti. Sur les murs des habitations, des slogans aux caractères rouges incitent à « travailler dur pour le pays » ou à faire des enfants, et des numéros de téléphones inscrits en très gros. Les ex travailleurs agricoles proposent leur bras pour des travaux de terrassement. Sachant que beaucoup ici ne cultivent que des petits lopins de terres -2 ou 3 acres de surface agricole au maximum-, confie cette grand-mère qui ramène son petit-fils de l’école. « Cette année, les prix des...
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  • La Chine encourage la visite de Taïwanais tout en menaçant d'exécuter les «indépendantistes»
    Jul 2 2024

    La Chine a menacé de mort les « indépendantistes » taïwanais. L'annonce a fait grand bruit à Taïwan. Que veut dire exactement cette nouvelle sanction ?

    De notre correspondant à Taipei,

    Alors la Chine a annoncé le 21 juin un nouveau règlement prévoyant des peines allant de 10 ans de prison jusqu'à la peine capitale pour ce que Pékin appelle les « indépendantistes chevronnés ». Ce crime a été en partie défini en 2005 dans la loi sur la sécession et vise tous ceux qui empêcheraient « l'unification pacifique » de Taïwan avec la Chine.

    Selon les médias d'États chinois, cette annonce est une réponse directe au discours d'investiture du nouveau président taïwanais William Lai en mai dernier. Le nouveau dirigeant a alors affirmé que Taïwan était « déjà un pays indépendant ». Une position connue, mais rarement exprimée de manière aussi directe. La déclaration de Zhu FengLian, porte-parole du gouvernement chinois : « Taïwan fait partie de la Chine. Tous les indépendantistes taïwanais qui osent braver la loi seront poursuivis sans relâche, peu importe où ils se trouvent, et punis sévèrement selon la loi ».

    Qui est concerné ?

    C'est toute la question. Le président taïwanais William Lai est considéré par Pékin comme un de ces indépendantistes plusieurs membres de son parti sont également sur liste noire de la Chine, comme par exemple la vice-présidente Hsiao Bi-khim.

    Mais la question se pose pour le reste du paysage politique taïwanais. Plus de 90% des Taïwanais sont opposés à l'annexion avec la Chine, tout comme la majorité des partis politiques taïwanais. C'est ce qui fait dire au président taïwanais que la Chine vise en réalité l'ensemble des Taïwanais : « Du point de vue de la Chine, si vous ne soutenez pas l'unification, alors vous êtes des indépendantistes. Autrement dit, il n'existe un seul parti à Taïwan qui n'est pas indépendantiste, c'est le parti pour la promotion de l'unification. Je veux dire à la Chine d'engager un dialogue avec le gouvernement légalement élu par les Taïwanais, la démocratie ne devrait pas être un crime. »

    Beaucoup de Taïwanais habitent ou travaillent en Chine. Qu'est-ce que cette nouvelle sanction pourrait changer ?

    Oui, des centaines de milliers de Taïwanais habitent ou se rendent régulièrement en Chine. Pékin a donc rapidement rétropédalé, « la grande majorité des Taïwanais n'a pas à s'inquiéter », a assuré le gouvernement chinois dans un communiqué.

    En réalité, beaucoup de Taïwanais s'inquiètent de leurs séjours en Chine Ces derniers mois, plusieurs contrôles voire des détentions provisoires ont été rapportés par des Taïwanais en visite sur le territoire chinois. Le gouvernement taïwanais a donc augmenté le niveau d'alerte pour les visites sur le territoire chinois, passé du niveau jaune à orange, et enjoint les Taïwanais à se rendre en Chine uniquement en cas de nécessité.

    Cette nouvelle mesure s'inscrit en réalité dans une stratégie assez claire de Pékin décrite par certains experts comme étant celle de la « carotte et du bâton ». D'un côté Pékin cherche à attirer les Taïwanais sur son sol, et en même temps à punir ceux qui ne seraient pas favorables à l'unification. À tout cela s'ajoute bien sûr des pressions militaires, économiques et diplomatiques qui devraient se poursuivre dans les prochains mois, mais dans des proportions encore inconnues.

    À lire aussiLa Chine impose la peine de mort aux indépendantistes taïwanais coupables de «crime de sécession»

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  • À Hong Kong, dix couples homosexuels célèbrent leur mariage en visioconférence
    Jun 28 2024

    C’est une première en ce mois des fiertés LGBT+. À Hong Kong, dix couples du même sexe se sont mariés collectivement mardi, 25 juin, en visioconférence avec les États-Unis. L’occasion de partager leur bonheur, certes, mais aussi une façon de franchir un pas en plus vers la légalisation du mariage pour tous.

    Vingt amoureuses et amoureux, en robes de mariée ou en smoking, se sont dit « oui » dans une ambiance festive, tandis que l’officier d’état civil qui conduisait la cérémonie se trouvait, lui, à 12 000 kilomètres de là, dans l’État américain de l'Utah, visible seulement sur un grand écran. Les autorités hongkongaises ne reconnaissent pas encore le mariage pour tous, et l’État de l’Ouest américain est l’un des seuls qui autorisent le mariage par visioconférence.

    Lucas Peng, un homme d’affaires de Singapour, heureux d’avoir enfin pu convoler en noces avec son partenaire de longue date, espère que cette cérémonie collective enverra un signal au monde : « J’espère qu’un jour tout le monde admettra que l’amour n’existe pas seulement entre un homme et une femme, mais entre deux personnes qui s’aiment. »

    La justice donne deux ans aux autorités pour créer un cadre légal

    Il reste pourtant du chemin à faire, puisqu’en septembre dernier, la plus haute juridiction de Hong Kong a rejeté la reconnaissance de mariages entre personnes du même sexe et même ceux contractés à l’étranger. Mais dans ce même verdict, les juges ont estimé que « le gouvernement contrevenait à son obligation de reconnaitre légalement les couples de même sexe », comme les unions civiles. Ils ont accordé un délai de deux ans aux autorités pour créer un cadre légal afin de garantir aux couples du même sexe les mêmes droits, concernant par exemple les impôts, les soins médicaux ou l’héritage.

    Ce jugement a donné de l’espoir à la communauté LGBT+ à Hong Kong. Depuis, les couples lorgnent sur les trois autres pays asiatiques qui ont déjà franchi le pas. C’est le cas de Taïwan, qui a ouvert le bal en 2019, du Népal, ou encore de la Thaïlande, où le Sénat a donné son feu vert ce mois-ci aux mariages pour tous, après des décennies de lutte.

    À lire aussiLa Thaïlande, premier pays d'Asie du Sud-Est à légaliser le mariage gay

    Les pays asiatiques à la traine

    Mis à part ces trois pays précurseurs, les autres nations asiatiques restent encore à la traine. Même si par exemple au Japon les choses bougent. Deux tribunaux japonais ont récemment jugé l’interdiction du mariage pour tous non conforme à la Constitution.

    Dans d’autres pays, à majorité musulmane, l’homosexualité même reste encore illégale, c’est notamment le cas en Malaisie. En Indonésie, elle n’est pas interdite, mais les discriminations sont multiples. Quant à la Chine, aucun cadre légal n’existe à ce jour pour l’union homosexuelle, et c’est justement pour cela que le mariage collectif célébré cette semaine à Hong Kong est si symbolique.

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  • Les Îles Salomon infidèles à la Chine ?
    Jun 27 2024

    Dans ce petit archipel du Pacifique que l'on a beaucoup décrit comme la porte d'entrée de Pékin dans la région, le gouvernement vient de changer et l'histoire ne s'écrit plus tout à fait de la même manière.

    Le signal, c'est le choix de Jeremiah Manele. Cette semaine, pour son premier déplacement à l'étranger, le nouveau Premier ministre salomonais n’a pas choisi Pékin, mais l'Australie.

    Au cours de la rencontre avec son homologue australien, il a été question de mobilité professionnelle, d’infrastructures, de changement climatique, de santé et de sécurité. Sur le papier, rien de flamboyant, juste une visite de courtoisie sans annonce concrète, quelques poignées de main et puis s'en va. Mais le message est passé : les îles Salomon cherchent à rééquilibrer leur politique étrangère après des années de critiques et d'invectives.

    Le ver est dans le fruit depuis la signature en 2022 d'un texte explosif, un accord de sécurité conclu entre les Salomon et la Chine, le premier du genre dans le Pacifique. Sans parler des contrats de développement portant sur des domaines très sensibles comme la coopération policière, les télécommunications, les câbles sous-marins ou les gisements de matières premières, remis aux bons soins des ingénieurs venus de Pékin.

    À écouter aussiPacte sécuritaire entre la Chine et les îles Salomon: quels enjeux?

    Tout cela, les Salomonais le doivent à leur Premier ministre sortant, accusé, en particulier par Washington, d'avoir vendu son âme au diable dans une zone d'influence anglo-saxonne. Accusé aussi d'avoir cédé à la Chine en échange de quelques valises de billets (il s’en défend). Et d'avoir électrisé son pays, où la population était loin d'être Pékin-compatible. Décision clivante, personne ne le nie. Mais qui était ministre des Affaires étrangères pendant tout ce temps-là ? Jeremiah Manele ! Le nouveau chef du gouvernement aura donc été le principal artisan de ce rapprochement avec les autorités chinoises et dit aujourd'hui de manière très diplomatique que « le plus important pour les îles Salomon, c'est de travailler avec tous nos partenaires afin de développer notre pays et d'aller de l'avant ».

    Que les Occidentaux, en guerre d’influence ouverte avec la Chine, apprécient ou non, il serait temps d’y croire. Les îles Salomon, l'un des pays les plus pauvres au monde, veulent sortir de la pauvreté d'une façon ou d'une autre. Elles ne regardent pas l'étiquette, elles regardent le produit. Ce produit, ce sont les bâtiments sortis de terre en quelques semaines, les routes refaites ou les services offerts par la Chine. Or, en face, il n'y a pas de compétition. Les Australiens et les Américains se sont réveillés un matin avec la gueule de bois et cherchent depuis à rattraper le retard.

    Sauf que le gouvernement des îles Salomon est satisfait de l'aide et du travail des Chinois, et que c'est un avertissement très sérieux pour les chancelleries occidentales. Au-delà des beaux discours tenus à Washington ou Canberra, les États insulaires de la région attendent encore une véritable politique d'accompagnement, sans quoi, tout le monde ira voir ailleurs. Et il sera trop tard pour se plaindre que des bases militaires chinoises fleurissent ici ou là.

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  • Inde: des fraudes provoquent l'annulation d'importants examens et le désespoir de la jeunesse
    Jun 26 2024

    En Inde, le Premier ministre Narendra Modi fait face au premier scandale de son nouveau mandat. Plusieurs concours nationaux, pour lesquels des millions de jeunes Indiens s’étaient préparés, ont dû être annulés suite à des fraudes.

    avec notre correspondant à Bangalore, Côme Bastin

    Ces examens annulés provoquent une crise car ces concours sont vraiment des pierres angulaires du système éducatif indien et le seul espoir, pour beaucoup de jeunes, en Inde, d’accéder à une formation et un emploi digne de ce nom.

    Le week-end dernier, c’est l’examen NEET-PG qui a été repoussé, quelques heures avant sa tenue, et ce pour la quatrième fois. Plus de 200 000 Indiens comptaient sur ces tests pour obtenir un master dans le secteur médical. Quelques jours plus tôt, un autre examen, le UGC-NET (pardon pour les acronymes !) qui conditionne l’admissibilité et des bourses pour les doctorants, notamment en langues et sciences humaines, a, lui aussi, été annulé, avec 1 million de candidats éconduits. Le NEET-UG, qui concerne plus de 2 millions d’Indiens voulant rejoindre les facultés de médecines, après l’équivalent du lycée, est, lui aussi, menacé d'être invalidé. À chaque fois, ce sont des fuites de sujets qui remettent en cause ces examens géants organisés par le gouvernement central.

    Dans plusieurs États, la jeunesse a laissé sa colère exploser dans la rue

    Et il y a eu des dizaines d’arrestations dans le pays, notamment dans l’État pauvre du Bihar, parce que les étudiants sont désespérés face à ces fiascos à répétition. Ce sont des examens extrêmement compétitifs, ou le nombre de candidats face aux places en école est extrêmement réduit. Pour la jeunesse, frappée en Inde par un chômage très important, savoir que les résultats sont pipés, car certains ont obtenu les sujets avant tout le monde, est une injustice insupportable. Or ces fuites ont lieu chaque année, provoquant des enquêtes judiciaires interminables qui laissent dans l’attente pour longtemps ceux dont les familles se sont sacrifiées pour les préparer aux concours. The Indian Express a mené l'enquête en février, avant même la vague récente d’annulation d’examens. Selon le quotidien, en cinq ans, ce sont 14 millions d’Indiens qui ont été affectés par la corruption qui sévit dans le secteur des examens en Inde, avec au moins 40 fuites recensées.

    La situation agite aussi le Parlement Indien, renouvelé après les élections le 4 juin

    L'opposition, qui avait déjà marqué des points durant les élections en faisant campagne sur le manque d’emplois pour les jeunes, attaque la coalition de Narendra Modi. Le Parti du Congrès accuse son parti, le BJP, de complaisance, voire de complicité localement avec ces examens corrompus et il a organisé des manifestations devant tous ses sièges politiques vendredi. Ce lundi, le ministre de l’Éducation fraîchement nommé a dû prêter serment devant les parlementaires sous les huées et les cris de honte. Le gouvernement accuse l’opposition de politiser le désespoir de la jeunesse. En creux, cette crise témoigne aussi d’un désenchantement général de la jeunesse Indienne. Ces concours nationaux sont pris d’assauts, mais même ceux qui les passent ne sont pas sortis d'affaires. Selon l’Organisation internationale du travail, près de 30 % des jeunes diplômés indiens, malgré leurs efforts, sont au chômage.

    À lire aussiInde: dans l’Haryana, le chômage des jeunes joue contre Narendra Modi

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  • Législatives 2024: le numérique au secours des candidats de la 11ᵉ circonscription des Français de l’étranger
    Jun 25 2024
    Le vote en ligne pour le premier tour des élections législatives, commence ce mardi 25 juin pour les Français de l’étranger. On en parle avec notre correspondant en Chine, Stéphane Lagarde, les électeurs ont trois jours pour voter via internet, après une campagne éclair qui pose un défi aux candidats dans des circonscriptions très élargies, comme la 11ᵉ circonscription des Français de l’étranger qui englobe l’Europe orientale, l’Asie et l’Océanie. Trois continents, quarante-neuf pays et neuf heures de décalage horaire entre Moscou et Auckland, les 15 candidats et candidates de la 11ᵉ circonscription ont mis les bouchées doubles ce week-end pour aller à la rencontre des électeurs. Une campagne essentiellement virtuelle compte tenu la taille de la zone à couvrir.« C’est un défi de faire campagne sur un temps aussi cours et dans une circonscription aussi vaste, mais nous sommes très largement sauvés par le numérique, puisque les candidats des circonscriptions des Français de l’étranger ont le droit d’utiliser les fichiers des emails des électeurs, lorsque ceux-ci ont donné leur accord au moment de leur inscription sur le registre consulaire et sur la liste électorale consulaire, nous expliqueAnne Genetet, députée sortante des Français établis hors de France et candidate à sa réélection pour Ensemble la République. C’est un fichier qui fait à peu près 80 000 adresses. Une fois que ce dernier a été nettoyé des adresses qui ont été mal rédigées ou des personnes qui, en respect total du règlement général de protection des données (RGPD) ne souhaitent pas recevoir de communication. Pour ma part, je dispose d’un fichier qui tombe à 50 000 adresses, ce qui est tout à fait considérable. Donc, nous utilisons beaucoup le numérique. Les visios conférence nous sont aussi extrêmement utiles. Je les utilise depuis 2017, car dans l’exercice de mon mandat, c’est le moyen qui me permet de rester en contact avec la circonscription. Une fois élue, le travail est à 90 % sur Paris, sachant que les parlementaires représentent la nation toute entière. Ils doivent voter les lois et évaluer et contrôler l’action des politiques publiques à Paris. Donc j’ai recours à ces visios conférences et à quelques déplacements choisis, car la circonscription étant vaste, il n’est pas question de laisser une empreinte carbone de dingue. » Empreinte carbone Gare à l’empreinte carbone effectivement dans cette circonscription qui compte près de 80 bureaux de vote… Il y a les outils numériques, mais est-ce que les candidats vont quand même à la rencontre des électeurs ? Entre le dépôt des candidatures dimanche 16 juin et le début des votes par internet, donc ce mardi 25 juin, neuf jours, c'est très très court pour parcourir l’ensemble de la circonscription. Seules quelques réunions publiques avec les électeurs sont possibles : Shanghai, Hongkong, l’Australie et Singapour où réside Anne Genetet. Hongkong, Singapour et la Thaïlande pour Marc Guyon, candidat Union des Droites dans la 11ᵉ circonscription. « C’est une campagne éclair qui laisse peu de temps, souligneMarc Guyon. Il faut faire beaucoup d’emailing, des visioconférences comme tout le monde. Mais je tiens aussi à faire une campagne sur le terrain, non seulement à Hongkong où je réside bien entendu. Mais aussi, j'ai souhaité répondre à deux demandes de réunion publique, l’une à Singapour et une autre à Phuket. Allez sur le terrain à la rencontre de nos compatriotes, c'est important. C’est, en tout cas, l’idée que je me fais d’un élu de la nation, mais aussi un élu de terrain qui représente ses compatriotes, qui connait le terrain, qui connait leurs problématiques et que vous pouvez rencontrer pour parler les yeux dans les yeux, en face à face. » Et on rappelle les dates du vote par internet... Si vous avez fait la démarche de vous inscrire, vous pouvez voter par internet du 25 au 27 juin à midi (heure de Paris), pour le premier tour. Et du 3 juillet, midi, heure de Paris, là encore, au 4 juillet, 18 heures, pour le second tour. ►Lien vote par internet sur le site du ministère des Affaires étrangères À lire aussiLégislatives 2024: défis techniques et course contre-la-montre pour la 11ᵉ circonscription des Français de l'étranger► La liste des 15 candidats qui se présentent pour ces législatives des 30 juin et 7 juillets prochains dans la 11ᵉ circonscriptions (Europe orientale, Asie, Océanie) est la suivante : Anne Genetet (Renaissance) Olivier Machet Marc Guyon (Union des Droites) Elise Phronrath Jacques Cheminade (Solidarité & Progrès) Victor Maurel Pierre Brochet (Rassemblement National) Franck Pajot (Nouveau Front Populaire) Françoise Arthur François Asselineau (Union Populaire Républicaine) Nelly Violette Tatians Boteva-Malo (...
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